" "
Posted by - support -
on - 3 hours ago -
Filed in - Society -
-
3 Views - 0 Comments - 0 Likes - 0 Reviews
La ville de Mbour, au Sénégal, illustre à elle seule les défis immenses auxquels sont confrontées de nombreuses cités côtières d’Afrique de l’Ouest face aux inondations. La question dépasse largement le cadre technique et met en lumière l’entrelacement de facteurs naturels, d’urbanisation désordonnée, de contraintes financières et de gouvernance éclatée.
L’agglomération mbouroise repose sur une géographie défavorable aux écoulements. Implantée sur un terrain plat, parfois en contrebas du niveau de la mer, elle subit d’importants obstacles naturels à l’évacuation des eaux pluviales. La saturation des sols, au plus fort de l’hivernage, accentue la vulnérabilité en limitant la capacité d’absorption. À ces contraintes s’ajoutent des épisodes climatiques extrêmes liés au réchauffement planétaire. Entre août et septembre 2025, des précipitations concentrées, oscillant entre 90 et 135 millimètres, ont submergé le dispositif existant, déjà insuffisant. L’ensablement et les obstructions diverses ont fini de bloquer des canalisations souvent vétustes.
À cette fragilité naturelle se superpose une urbanisation rapide, anarchique et périlleuse. Sous l’effet conjugué de la croissance démographique et de la demande en logements, les populations s’installent dans des zones à risque, notamment les zones humides et bassins de rétention, progressivement comblés. Ce grignotage des espaces naturels, véritables éponges urbaines, amplifie le péril. Par ailleurs, le réseau d’évacuation, sous-dimensionné, est régulièrement paralysé par les déchets. Les ouvrages modernes réalisés — bassins de rétention, conduites enterrées, stations de pompage — se heurtent à des coûts élevés de maintenance, rarement pris en charge. L’exemple de la lagune de Mballing est édifiant : ses berges, loties et occupées, sont chaque année envahies par les eaux de ruissellement. Certes, l’érection de grilles avaloirs à la Zone Sonatel, avec le concours de l’Onas, a apporté un soulagement partiel, tout comme la réfection d’une digue reliant ce quartier à Terrou-Mballing. Mais l’absence d’entretien régulier réduit rapidement l’efficacité de ces ouvrages. La gestion technique des eaux dans une zone aussi basse suppose en outre des solutions énergivores et complexes, dont la durabilité locale reste fragile.
À cela s’ajoute un défi de gouvernance. La multiplicité des acteurs impliqués complique la mise en œuvre de toute stratégie cohérente. L’État central, la mairie, les agences techniques et les populations devraient agir de concert, mais les responsabilités apparaissent floues et mal coordonnées. Quant aux règles d’urbanisme censées interdire les constructions en zones inondables, elles cèdent souvent face aux urgences de logement, aboutissant à des régularisations a posteriori des quartiers informels.
Sortir de ce cercle vicieux exige une approche globale combinant plusieurs leviers : une planification stricte interdisant toute construction dans les zones à risque et préservant les bassins naturels ; des investissements dans des infrastructures résilientes et correctement entretenues ; une sensibilisation des populations à la gestion des déchets et à la préservation des zones humides ; une réhabilitation des écosystèmes, véritables alliés naturels des villes. Enfin, une meilleure coordination entre tous les acteurs, du local au national, demeure impérative.
Le cas de Mbour illustre une réalité partagée par bien des cités littorales africaines : la lutte contre les inondations n’est pas seulement affaire d’ingénierie, mais relève d’un enjeu profond d’aménagement, de gouvernance et de ressources. Une bataille qui doit être pensée sur le long terme, pour garantir à la fois sécurité et qualité de vie aux populations
Samba Niébé Ba
L’article Mbour, une ville littorale piégée par les eaux est apparu en premier sur Sud Quotidien.