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Raconter le Fespaco en 261 pages, c’est le pari que le journaliste et critique de cinéma sénégalais, Aboubacar Demba Cissokho, a réussi. Dans son ouvrage «Fespaco. Par-delà les écrans», paru chez Baobab Editions, le professionnel chevronné plonge au coeur de l’un des plus grands festivals du continent.
Par Mame Woury THIOUBOU – De 2003 à 2025, Aboubacar Demba Cissokho a été un fidèle participant du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco). Hormis l’édition de 2017 qu’il a ratée, élection présidentielle sénégalaise oblige, Cisko, comme il est appelé, ou encore Kibili, a été au cœur de cet évènement majeur du cinéma africain. Ce vendredi, il a présenté, au Raw Material Company, l’ouvrage qui synthétise ces expériences. Devant un public nombreux et intéressé, Aboubacar Demba Cissokho a plongé dans ses souvenirs, ses notes et ses articles. Fespaco. Par-delà les écrans, ouvrage de 236 pages publié à Baobab Editions, est une mémoire vivante de cet évènement. Pour l’auteur, tout commence en 2003. Cette année-là, le Sénégal a une présence remarquable au Fespaco. Le Prix du pardon de Mansour Sora Wade et Madame Brouette de Moussa Sène Absa sont en compétition. Aboubacar Demba Cissokho arrive à Ouagadougou, le samedi 22 février 2003, pour couvrir la 18e édition du Fespaco. C’est la découverte de Ouagadougou, cité sahélienne qui «renvoie à tous points de vue à ma ville natale, Tambacounda». Un lien affectif se tisse aussitôt, et qui ne sera jamais défait. Et l’année 2003 marque ainsi le début d’une aventure qui se poursuit encore aujourd’hui. Une magie que l’auteur sait partager avec tous ces professionnels du cinéma qui accourent à Ouaga tous les deux ans pour «se regarder dans le miroir». «Depuis 2005, je me suis dit qu’il n’est plus question pour moi de rater le Fespaco, parce que pour moi, c’est bien qu’on ait nos discours sur ce que j’appelle nos affaires. Pour moi, c’est le plus grand festival au monde, malgré les difficultés, parce que c’est le plus important pour nous. C’est là que nous nous regardons dans le miroir, c’est là que nous nous disons des vérités, c’est là que nous nous fâchons», assure le journaliste culturel de l’Agence de presse sénégalaise (Aps).
Après vingt ans de couverture, difficile pour le journaliste de ne pas parler des difficultés de ce festival. «Cinéastes, critiques, journalistes, professionnels, on se dit qu’on ne revient plus à Ouagadougou. Que c’est trop compliqué, qu’il y a trop de problèmes. Mais en septembre des années paires, on commence à s’écrire des messages pour demander : «Alors, tu es invité, tu vas au Fespaco ?»», rapporte l’auteur. Il raconte ainsi cette édition de 1987, la dernière à laquelle participe Thomas Sankara, et où le Mauritanien Med Hondo remporte l’Etalon du Yennenga pour son film Saraouinia. Surprise, le réalisateur n’est pas sur le podium pour récupérer son trophée. Mais à la fin de la soirée, le Président du Faso et lui dîneront ensemble, comme il était de coutume pour Sankara de recevoir le vainqueur. «Malgré toutes ces contradictions, la politique, il y a comme une magie qui fait que tout le temps, les Burkinabè sont enthousiastes, les gens sont enthousiastes.»
«Un bréviaire pour cinéastes et critiques»
L’ouvrage de Aboubacar Demba Cissokho réunit des textes, des articles, des analyses et des chroniques diffusés sur le fil de l’Aps, sur Facebook ou sur le blog qu’il a animé pendant longtemps, Le grenier de Kibili. En réunissant tous ces écrits dans un ouvrage, ADC réalise un «bréviaire pour les critiques et les cinéastes», estime le Pr Ibrahima Wane, qui a assuré la présentation de l’ouvrage. Il faut dire qu’au fil des pages, l’histoire du Fespaco est évoquée à travers des faits, des témoignages et des récits. Le rôle d’anciens comme Sembène Ousmane et Tahar Cheriaa, leur volonté de faire vivre le cinéma africain sont autant de belles promesses contenues dans les pages de l’ouvrage. «Selon Sembène, le Fespaco est un moment important pour poser les problèmes du cinéma africain, qui reste un élément de notre identité culturelle même si les politiques nous soutiennent de moins en moins», rapporte Cissokho, évoquant sa première rencontre avec Sembène au Fespaco.
Les jurys en question
En suivant pas à pas l’évolution de ce rendez-vous continental, Aboubacar Demba Cissokho documente l’histoire du festival. L’arrivée de Alex Moussa Sawadogo à la tête de la Délégation générale a insufflé un vent de modernité, avec des conditions de sélection qui s’éclaircissent par la mise en place d’un comité de sélection. Pour autant, le travail des différents jurys reste sujet à discussion. Entre l’amertume des cinéastes recalés au podium, le parti pris des cinéphiles, l’enthousiasme populaire et quelques enjeux politiques qui s’invitent, les palmarès sont une équation pour tous. «Des choix très discutables en termes d’esthétique et de technique. Mais en même temps, quelquefois, le jury surprend par son assurance, sa façon de rester impassible face à toutes les pressions internationales, politiques, etc.», souligne Cissokho. Sur ce chapitre, on peut ranger la forte désillusion de Abderrahmane Sissako qui, en 2015, arrive au Fespaco auréolé de 7 César reçus par son film Timbuktu en France. Il ne repartira de Ouaga qu’avec le Prix du décor. Ironie mordante d’un jury qui affirme sa souveraineté et son indépendance, estime ADC.
Au fil des pages du livre, ce sont ainsi des analyses et critiques, mais aussi des anecdotes d’un professionnel qui a pratiqué les coulisses du festival, et pendant de nombreuses années. Aussi bien en tant que cinéphile, journaliste critique que membre du jury, les écrits de Aboubacar Demba Cissokho sont une chronique fidèle et sincère d’un évènement d’envergure qui, dans sa résilience, continue de se tenir contre vents et marées. Coups d’Etat, menaces terroristes ou Covid-19 n’ont pas encore pu empêcher sa tenue. Dans sa préface, l’ancien ministre de la Culture et ancien Délègue général du Fespaco, Filippe Savadogo, écrit qu’en poursuivant la lecture de l’ouvrage, «on va à l’école de l’histoire, de l’évolution et de l’avenir du Fespaco».
mamewoury@lequotidien.sn
L’article Ouvrage sur le Fespaco : AD Cissokho projette le film de ses festivals est apparu en premier sur Lequotidien - Journal d'information Générale.