Au Parlement européen, les 27 intergroupes, organes non officiels de l’instance parlementaire mais néanmoins reconnus par elle comme des lieux d’échanges informels sur des sujets précis, sont en cours de constitution. Alors que 26 de ces intergroupes sont consacrés à des thèmes spécifiques tels que la lutte contre la corruption, le cancer, les droits des enfants, etc., un seul fait bande à part en se consacrant à un sujet politique, conséquence de manœuvres avérées de l’Algérie.

Dans sa version 2024-2029, le Parlement européen semble destiné à rester terni par l’intergroupe dit “Sahara occidental”, qui soulève une grande interrogation sur une ingérence étrangère, précisément algérienne, dans cette instance.

En effet, la liste des 27 intergroupes en cours de constitution couvre un large éventail de thèmes : la lutte contre la corruption, la lutte contre le racisme, l’intelligence artificielle, la lutte contre la pauvreté, les défis démographiques, le bien-être et la conservation des animaux, etc. Toutefois, un unique intergroupe porte sur une question politique, à savoir le Sahara marocain.

“Ce qui est très intéressant avec cet intergroupe, c’est qu’il est le seul des 27 à avoir une vocation tellement politique et il est surprenant qu’il figure parmi les autres intergroupes. Il s’agit d’un intergroupe ouvertement polémique et agressif, alors qu’habituellement ces intergroupes réunissent des personnes spécialisées dans un domaine particulier”, indique dans une déclaration à Hespress FR l’eurodéputé Thierry Mariani.

“Logiquement, les intergroupes sont faits pour travailler en commun. Et en réalité, on sait très bien que si on demande de constituer cet intergroupe, c’est pour en faire un groupe militant et offensif contre le Maroc et en soutien aux thèses algériennes”, souligne Mariani.

Et l’eurodéputé de faire savoir que pour constituer un intergroupe, il faut que trois des huit groupes que compte le Parlement européen le parrainent. “Ils l’ont déjà créé par le passé et je pense que cette fois-ci, il est plus que probable qu’ils parviendront à le recréer, étant donné que cet intergroupe bénéficie traditionnellement du soutien des Verts, de l’extrême gauche et des socialistes”, dit l’eurodéputé, ajoutant que “des figures comme Rima Hassan, aux connivences affirmées avec l’Algérie, ont déjà annoncé leur intention de faire partie de cet intergroupe”.

Une ingérence extérieure au Parlement européen

La présence de cet intergroupe pose donc la question évidente de son instrumentalisation à des visées d’un pays comme l’Algérie. C’est ce que craint le journaliste Alexander Morales dans un article intitulé “Intergroupe Sahara Occidental : Entre plaidoyer et possible ingérence extérieure au Parlement européen”.

De fait, ce dernier insiste dans son article sur le fait que le Parlement européen doit être protégé de toute influence extérieure qui chercherait à le manipuler au détriment de ces principes, surtout que l’article 35 de son règlement intérieur fixe clairement les limites des intergroupes, afin d’éviter qu’ils ne soient instrumentalisés ou manipulés par des intérêts extérieurs.

Alexander Morales rappelle que l’un des intergroupes les plus controversés, sinon le seul, “est celui du +Sahara occidental+, qui semble être fortement influencé par le soutien du régime militaire algérien”.

L’activité de cet intergroupe, poursuit le journaliste, “a soulevé des inquiétudes quant à la possible violation des règles internes du Parlement Européen. Il y a eu une influence algérienne notable dans ses actions, qui semblent être orientées exclusivement vers des intérêts spécifiques dans la région. Cela a conduit plusieurs députés européens, y compris d’anciens membres de l’intergroupe, à remettre en question ses pratiques et à s’inquiéter de la confusion qui pourrait survenir entre les activités officielles du Parlement et les agendas d’acteurs extérieurs”.

Et de noter que “le soutien aux mouvements régionaux soulève une question essentielle : si le Parlement européen s’implique dans un cas particulier, doit-il étendre ce soutien à d’autres mouvements similaires dans d’autres régions, comme les Kabyles ou les Touaregs ? Ce manque de cohérence dans son approche soulève des doutes quant au fait que l’intergroupe sélectionne stratégiquement ses causes ou qu’il omet délibérément d’autres cas tout aussi pertinents”.

Le journaliste se demande également “si l’intergroupe n’utilise pas les valeurs démocratiques européennes pour poursuivre des objectifs politiques étrangers aux principes démocratiques universels. Est-il devenu un lobby non enregistré au sein du Parlement européen ? Pourquoi est-il sans cesse renouvelé alors que d’autres questions géopolitiques pertinentes, telles que la paix au Moyen-Orient, la situation en Ukraine ou l’influence d’acteurs extérieurs au Maghreb, ne reçoivent pas la même attention ?”.

En outre, écrit Morales, “les activités de l’intergroupe ont suscité des soupçons quant à son alignement sur les règles de procédure du Parlement européen, en organisant des réunions et des voyages dans des zones sensibles sans mandat officiel. Cela a créé une certaine confusion quant à la position du Parlement sur les questions de politique étrangère et soulève la question de savoir si l’intergroupe ne promeut pas involontairement les intérêts de pays tiers plutôt que ceux de l’UE et de ses citoyens”.

Dans ce contexte, conclut le journaliste, “il est légitime de réfléchir à la nécessité d’une plus grande transparence dans les activités des intergroupes du Parlement. Est-il raisonnable qu’un intergroupe se concentre exclusivement sur une question régionale spécifique, alors qu’il existe d’autres conflits et minorités qui requièrent également une attention particulière ? La stabilité régionale est cruciale pour l’UE, il est donc essentiel d’évaluer l’impact de ces groupes sur les relations avec des partenaires stratégiques tels que le Maroc”.

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