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L’Autorité Nationale du Renseignement Financier (ANRF) a ouvert une enquête sur des opérations de blanchiment d’argent via des cessions frauduleuses de fonds de commerce de restaurants en faillite dans plusieurs villes marocaines, notamment Casablanca, El Jadida et Tanger. Ces transactions douteuses ont attiré l’attention des autorités suite aux signaux émis par des agents immobiliers et des notaires.
Ces récentes révélations qui ont attiré l’attention des autorités sur des transactions suspectes ont mis, une fois de plus serions-nous tentés de dire, en lumière un phénomène récurrent et profondément ancré dans les pratiques de blanchiment d’argent ? Derrière des cessions en apparence légales, ce système met à nu les fragilités structurelles et réglementaires qui entourent ce type de transactions au Maroc.
L’enquête suite aux transactions a révélé que des propositions d’achat de fonds de commerce dépassaient parfois 10 millions de dirhams, des sommes jugées disproportionnées par la situation financière des établissements concernés. Certains de ces fonds présentaient des dettes fiscales importantes, des saisies conservatoires et des arriérés d’impôts locaux, aggravant les soupçons de fraude.
Les fonds de commerce, notamment ceux des restaurants en difficulté, offrent un terrain propice au blanchiment d’argent. Pourquoi ? Parce qu’ils permettent d’injecter des sommes importantes dans des biens dévalorisés, tout en masquant l’origine des fonds.
Les restaurants en particulier, en raison de leur nature liquide (paiements en espèces fréquentes) et de leur comptabilité souvent opaque, sont des vecteurs classiques de transactions dites de « recyclage » d’argent sale. Dans ce contexte, les transactions surévaluées dépassant 10 millions de dirhams prennent des allures de signal d’alarme évident.
Le recours à des comptables spécialisés, à des fonctionnaires corrompus ou à des agents immobiliers complices démontre que ce phénomène n’est pas isolé. Il s’agit souvent de réseaux organisés, où chaque acteur joue un rôle précis pour contourner la loi. Cela se fait à travers des contrats informels, permettant d’échapper aux contrôles officiels, de manipulation des données comptables pour maquiller les dettes ou fausses valorisations et de l’inaction de certains professionnels censés déclarer les anomalies, malgré leurs obligations légales.
La décision récente de renforcer les obligations des agents immobiliers, via l’arrêté ministériel 133.23, vise à combler cette faille. Mais, encore faut-il que ces mesures soient appliquées rigoureusement sur le terrain. Le recours aux échanges électroniques inter-administrations a permis de détecter ces anomalies, mais il reste beaucoup à faire pour traquer les transactions à l’international.
La participation des acquéreurs à double nationalité disposant de comptes bancaires au Maroc et à l’étranger a également été relevée grâce à une coopération entre l’ANRF et le Bureau de Change. La présence de ces acquéreurs soulève un autre problème majeur : l’évasion fiscale et le transfert illégal de capitaux. En effet, certains acheteurs n’ont pas respecté les exigences liées à la déclaration des biens à l’étranger, dont la date limite de régularisation arrive à fin décembre.
Il est à noter que cette procédure de régularisation des avoirs étrangers, dont l’échéance approche, pourrait accentuer les fraudes dans les derniers jours. Cela montre que certaines réglementations, bien qu’incitatives, peuvent être utilisées comme paravent pour légaliser des capitaux douteux.
Le Maroc, en s’engageant activement dans cette lutte, protège son économie formelle et sa crédibilité à l’international. Car au bout de cette chaîne de blanchiment se trouvent des risques bien réels : corruption, fragilisation des institutions et évasion fiscale. Aussi, la vigilance doit s’inscrire dans la durée et non pas s’éteindre une fois les projecteurs sur off.
Le blanchiment d’argent via des fonds de commerce en faillite est le reflet d’une faille systémique, exploitée avec facilité par des réseaux organisés. Si les récentes enquêtes montrent une volonté ferme des autorités marocaines d’agir, elles soulignent également l’urgence d’une modernisation des mécanismes de contrôle et d’une tolérance zéro face aux acteurs complices.
Cette affaire, révélatrice de lacunes dans le contrôle des fonds de commerce, souligne l’urgence de renforcer les mécanismes de transparence pour lutter efficacement contre la criminalité financière et protéger l’économie nationale des pratiques frauduleuses.
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