Dans un document publié récemment dans le cadre de son rapport sur les performances de la pêche maritime en 2022, la Direction générale des affaires maritimes et de la pêche (DG MARE) de la Commission européenne a inséré une carte du Maroc qui ne laisse place à aucune ambiguïté. Le visuel, d’apparence purement technique, affiche un Royaume pleinement unifié, couvrant l’ensemble de son territoire du nord au sud, jusqu’à Lagouira. Aucune mention, aucun signe distinctif, ni hachures ni annotations, ne vient nuancer cette représentation.

Cette carte accompagne les données halieutiques relatives à l’année 2022, mettant en évidence la vitalité du secteur de la pêche marocain. Mais pour de nombreux observateurs, c’est bien le choix de cette illustration géographique qui retient l’attention, tant il tranche avec les pratiques précédentes des institutions européennes. Longtemps, ces dernières avaient adopté une posture prudente dans leur manière de représenter le territoire marocain, notamment en raison des sensibilités diplomatiques liées au Sahara.

Or, cette fois, la carte publiée par la Commission européenne se passe de tout artifice diplomatique. Elle reflète, dans ses contours, une vision administrative alignée sur la réalité du terrain : celle d’un Maroc exerçant son autorité sur l’ensemble de son territoire, y compris les provinces du Sud. Cette publication, même sans commentaire explicite, s’inscrit dans une évolution plus large des représentations officielles au sein de plusieurs puissances occidentales soulignent les observateurs.

En France notamment, les autorités ont récemment modifié leurs supports géographiques officiels pour intégrer les provinces sahariennes sans démarcation. Une mise à jour perçue comme un signal fort, traduisant une reconnaissance assumée de la souveraineté marocaine sur cette région. La carte de la DG MARE s’inscrit dans ce sillage, et bien qu’elle n’émane pas d’un service diplomatique, elle n’en demeure pas moins porteuse de signification. Dans les arcanes des relations internationales, les choix graphiques sont rarement anodins.

Sur le fond, le rapport met en lumière des chiffres solides pour le secteur maritime marocain. Les captures halieutiques ont atteint près de 1,6 million de tonnes en 2022, soit une hausse de 11 % par rapport à 2021. Cette progression est principalement attribuable à l’abondance des prises de sardine européenne, dont les volumes ont bondi de 25 %.

Côté aquaculture, la production reste modeste en volume, avec 2.300 tonnes enregistrées, mais elle se distingue par la valeur des espèces cultivées. Trois d’entre elles dominent largement le segment à savoir l’huître creuse du Pacifique (Crassostrea gigas), l’anguille européenne (Anguilla anguilla) et le tilapia du Nil (Oreochromis niloticus), qui représentent à elles seules 87 % de la production aquacole.

Ces données ont été diffusées via le compte officiel @EU_MARE sur X (ex-Twitter), accompagnées de la carte en question. Aucun commentaire n’y est associé quant à la représentation territoriale, mais son absence d’explication en dit long.

Là où les discours diplomatiques peuvent rester flous, la cartographie, elle, affirme – sans mot dire – une position. En choisissant de montrer le Maroc tel qu’il s’administre, l’Union européenne adopte, sciemment ou non, une posture moins équivoque qu’elle ne l’a été par le passé.

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