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Plus d’un an après leur dépôt devant la justice, plusieurs dossiers liés au Centre hospitalier universitaire Ibn Rochd demeurent enveloppés de zones d’ombre. Parmi eux figurent des affaires sensibles telles que des décès jugés suspects au service de neurochirurgie, le dossier désormais connu sous le nom de « l’injection du 20 août » ayant entraîné la cécité de plusieurs patients diabétiques, ou encore d’autres affaires pour lesquelles aucune enquête n’a été ouverte, notamment des décès survenus au sein du service de maternité et des soupçons de trafic d’équipements orthopédiques.
Concernant l’affaire qui a suscité une vague d’indignation depuis septembre 2023, celle de la cécité de 16 patients diabétiques ayant reçu une injection oculaire, les investigations ont révélé que le produit administré n’était pas autorisé par le ministère de la Santé. Ces victimes sont restées livrées à elles-mêmes, sans solution ni prise en charge, malgré une attente dépassant les deux ans. Selon nos sources, l’enquête a été suspendue, et aucune évolution n’a été communiquée aux victimes, bien que cette affaire ait connu un retentissement international, notamment à travers les médias audiovisuels et numériques.
Dans ce contexte, Fatima Zahra Aniba, porte-parole des victimes de « l’injection du 20 août », a déclaré que les 16 personnes concernées continuent de subir de lourdes conséquences, tant sur le plan sanitaire que social et financier, plus d’un an après l’ouverture de l’enquête menée par la Brigade nationale de la police judiciaire. Celle-ci avait été diligentée sur instruction du procureur général près la Cour d’appel de Casablanca, à la suite de plaintes déposées par les victimes dans le but d’élucider les circonstances de leur perte de vue et de déterminer les responsabilités, en vue de l’application de sanctions légales à l’encontre des personnes impliquées.
Aniba a souligné, dans une déclaration à Hespress, que les victimes espèrent toujours connaître l’issue de leur dossier, dans l’espoir de sortir d’une situation qu’elles endurent depuis de longs mois. Elle a précisé que les victimes, tout comme leurs proches, lancent un appel pressant aux autorités judiciaires pour accélérer les investigations, identifier l’origine de cette injection, ainsi que les personnes responsables de sa diffusion, et prévenir d’éventuels risques pour d’autres patients. Elle a également insisté sur le fait que plusieurs victimes se retrouvent aujourd’hui sans emploi ni soutien familial en raison de leur cécité, confrontées à une précarité sociale extrême et à de grandes difficultés pour poursuivre leurs soins.
Quant au dossier des décès survenus au sein du service de neurochirurgie, objet d’une plainte déposée par l’Association de défense des droits de l’Homme, il a été classé sans suite, sans audition des témoins ni transmission des procès-verbaux. Ces derniers faisaient pourtant état de témoignages de proches des défunts évoquant des circonstances troubles et affirmant que leurs proches sont décédés dans des conditions suspectes. Ils ont évoqué la possibilité d’erreurs médicales, fondée sur les circonstances des décès et les réponses contradictoires fournies par les responsables de l’hôpital.
En mars 2022, l’Association de défense des droits de l’Homme avait publié un communiqué annonçant qu’elle se faisait le relais des plaintes de familles de victimes confrontées à une hausse inquiétante du nombre de décès et du taux de mortalité post-opératoire, qu’elle attribue à des erreurs médicales commises par un médecin dont elle a cité le nom, précisant qu’il était chef du service de neurochirurgie. Selon elle, le taux de mortalité y dépassait les 50 %.
L’association avait adressé une plainte au ministère de la Santé et une autre au parquet général près la Cour d’appel de Casablanca, laquelle avait été transférée au tribunal correctionnel d’Aïn Sebaâ, dans le but d’établir les responsabilités et de lier celles-ci à des mesures de reddition des comptes. Cependant, l’association affirme qu’aucune mesure concrète n’a été prise pendant plus d’un an. Le dossier reste bloqué à un stade d’enquête administrative et judiciaire marqué par l’hésitation et l’inefficacité, et ce sans qu’aucune information ne lui soit communiquée sur le suivi de ses plaintes. Elle regrette que, malgré la gravité des faits et de leur contenu, aucune attention n’ait été portée par les autorités de contrôle et d’enquête, que ce soit au niveau ministériel ou judiciaire.
Dans ce sens, l’association appelle le ministère de la Santé et la présidence du ministère public, chacun dans le cadre de ses compétences, à prendre des mesures urgentes et légales pour protéger le droit à la vie et poursuivre les responsables, tout en dénonçant la persistance d’une culture de l’impunité.
Le 11 août 2023, le directeur de l’hôpital Ibn Rochd a adressé un avertissement urgent au chef du service d’orthopédie, dans lequel il reconnaît l’existence de pratiques de « vente et d’achat » impliquant l’exploitation des patients, orientés vers des structures privées extérieures à l’hôpital pour l’acquisition de matériel d’ostéosynthèse, en violation des procédures en vigueur. Ce courrier, qualifié de « catastrophique » et « choquant » par plusieurs observateurs, contient des éléments constitutifs d’infractions pénales. Cependant, au lieu de transmettre l’affaire au conseil disciplinaire ou à la justice, le directeur s’est contenté d’alerter le responsable du service, ce qui est perçu comme une « tentative de dissimulation de faits graves relevant du domaine de l’interdit ».
Dans ce courrier, le directeur exige des médecins du service d’orthopédie qu’ils cessent immédiatement de prescrire aux patients des ordonnances les obligeant à se procurer des implants orthopédiques auprès d’une société privée située à proximité de l’hôpital. Il ajoute avoir personnellement constaté cette pratique, qu’il considère comme contraire au protocole interne du CHU, lequel prévoit l’usage d’équipements fournis et validés par l’administration.
Aussi, le message interdit formellement la prescription de dispositifs métalliques à acquérir en dehors de l’hôpital, et enjoint les responsables des soins infirmiers à veiller au respect de cette mesure, en refusant tout matériel provenant de l’extérieur et en rédigeant des rapports quotidiens sur les activités suspectes de « vente et d’achat » de ces équipements.
Malgré cette alerte, les pratiques dénoncées se poursuivent. Les patients continuent d’être contraints d’acheter ces équipements auprès d’une entreprise bien identifiée, sur la base d’ordonnances rédigées par les médecins eux-mêmes. L’administration, de son côté, n’a pas engagé de vérification des dossiers médicaux ni des ordonnances délivrées aux patients souffrant de fractures, lesquelles contiennent du matériel non homologué par l’établissement. L’achat de ce matériel se fait en dehors des règles légales, nourrissant des soupçons de collusion entre certains médecins et des sociétés privées en quête de marges bénéficiaires.
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