La souffrance continue pour les familles concernées par les démolitions à Rabat. Alors que les autorités affirment vouloir donner un « nouveau visage » à la capitale, de nombreux résidents déplorent un manque de solutions concrètes et d’accompagnement dans ce processus.
L’un des témoignages les plus poignants provient d’un habitant du quartier Gharbia. Né dans cette maison il y a près de 70 ans, il y vit toujours avec sa famille. « Nous n’avons jamais eu de problème avec le propriétaire. Nous payons notre loyer chaque mois et avons toujours entretenu la maison à nos frais », explique-t-il. Mais la semaine précédant le Ramadan, le Pacha a annoncé la démolition imminente de leur domicile, une nouvelle qui a jeté l’effroi dans cette famille profondément attachée à son quartier. « Ma mère, âgée, n’a pas accepté l’idée d’être “chassée” de sa maison », confie-t-il, déplorant l’absence de solutions adaptées à leurs besoins.
Cette famille, comme bien d’autres, réclame au micro de Hespress FR des alternatives de logement dans le même secteur. « Nous ne pouvons pas nous installer à Temara ou Salé. Ma mère et ma sœur ne s’y adapteraient pas. Elles se sentiraient perdues, dépaysées », insiste l’habitant. Il appelle les autorités à fournir un soutien concret pour permettre aux familles d’un quartier historique de Rabat de rester dans leur environnement.
Même pour les familles “initialement” non concernées, le spectre de la démolition plane. Dans le quartier d’El Akari, un autre résident, qui vit sur un terrain acheté par son père en 1936, exprime une inquiétude similaire. Les rumeurs annoncent la démolition de tous les immeubles de l’avenue Mohammed Ben Abdellah, et bien qu’il se trouve un peu éloigné de cette avenue, la menace pèse lourdement sur sa maison. « Nous avons entendu parler des projets de démolition, mais aucune confirmation officielle n’a été donnée. Nous attendons de voir ce que l’avenir nous réserve », déclare-t-il. Sa maison de 120 mètres carrés, comprenant deux étages et deux garages, pourrait elle aussi être concernée par ces destructions.
Cependant, il reste lucide : « Nous ne pouvons rien dire si les démolitions nous touchent. D’autres familles ont été aidées, et nous espérons que des solutions équitables seront proposées pour nous aussi».
Les témoignages recueillis révèlent également des conditions de vie extrêmement précaires pour de nombreux habitants. Une femme du quartier Gharbia, âgée de plus de 80 ans, témoigne : « Je vis ici depuis ma naissance, et je considère ce quartier comme le cœur de Rabat». Mais aujourd’hui, avec la menace de démolition qui pèse sur leurs logements, de nombreux habitants se sentent abandonnés et incertains pour leur avenir.
Une autre résidente déclare vivre dans des pièces de 4 mètres carrés, dans des conditions «lamentables », en souffrant de la situation de précarité dans laquelle elle se trouve. « Nous avons été rassurés par les autorités, qui nous ont promis de l’aide. Le Pacha nous a même annoncé que nous serons indemnisés », raconte-t-elle. Bien que les autorités aient pris des mesures pour aider certains habitants, plusieurs s’interrogent sur la réalité de ces promesses et sur la manière dont elles seront concrétisées.
Pour certains, la promesse d’un Rabat « moderne et connecté » doit s’accompagner d’une attention particulière à la situation des habitants, qui ne doivent pas être sacrifiés sur l’autel de la modernité. En effet, derrière les chiffres et les projets de renouvellement urbain, il y a des vies bouleversées, des histoires familiales fragilisées, et des citoyens qui demandent plus que des promesses : des actions concrètes.
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