C’est une des interrogations qui secouent le cénacle politique français du moment. Le gouvernement de Michel Barnier pourra-t-il résister à la censure brandie par la gauche et l’extrême droite contre lui?

Cette question est au cœur du débat politique depuis que se rendant compte qu’il ne pouvait compter sur une aucune majorité à l’Assemblée nationale pour faire passer le budget de de 2025, mission pour laquelle il a été choisi par Emmanuel Macron, Michel Barnier a fait savoir qu’il sera contraint de recourir au fameux article de la constitution 49.3 qui lui fait économie du débat et du vote parlementaire.

Dans une forme d’automaticité parlementaire, le déclenchement du 49.3 implique forcément le dépôt d’une motion de censure par la gauche, toujours prête à en découdre avec le Président Emmanuel Macron qu’elle accuse de lui avoir volé sa victoire après les dernières législatives qui l’avaient vue prendre la première place victorieuse sans toutefois récolter une majorité parlementaire nette. La gauche tenait cette motion de censure comme une épée de Damoclès suspendue sur la tête du gouvernement.

Or cette motion n’aura été fructueuse et efficace que si l’extrême droite de Marine Le Pen, qui dispose d’un groupe parlementaire massif, se joint à cette aventure. Depuis le début de ce Cabinet Barnier, Marine Le Pen a donné des gages de ne pas faire tomber le gouvernement pour ne pas participer à la stratégie de chaos voulue par son ennemi intime le chef de la France insoumise, Jean Luc Mélenchon. En plus de la question qui travaillait les rangs de cette extrême droite : quel intérêt politique du moment pour Marine Le Pen de faire chuter le gouvernement, faire le jeu de la Gauche?.

Ce qui donne cette impression que les intérêts de la gauche et de la droite peuvent converger à l’occasion du recours de Michel Barnier au 49.3, est à trouver du côté des évolutions politiques qui ont touché l’extrême droite.

Premier niveau: Contrairement aux souhaits de Marine Le Pen, non seulement Michel Barnier ne s’est pas soumis à ses désidératas, il a montré une sorte d’indépendance insolente à l’égard d’une force politique dont dépend son avenir. Il a aussi choisi une personnalité comme Bruno Retailleau au ministère de l’intérieur pour faire le travail de l’extrême droite avec pour mission de démystifier l’icône de Marine Le Pen. Tant au niveau de son discours que de ses postures, Bruno Retailleau semble avoir partiellement réussi. Ce qui a le don d’agacer profondément cette extrême droite qui se présentait aux Français comme la détentrice exclusive des solutions régaliennes pour soigner les maux de l’immigration et de l’insécurité.

Le second niveau qui prépare les esprits à ce que Marine Le Pen puisse rejoindre la gauche dans sa motion de censure et faire chuter le gouvernement est à trouver dans son actuel état d’esprit après sa sortie de la lessiveuse judiciaire dans l’affaire dite des « assistants parlementaires ».

Le parquet a réclamé contre elle des amendes, des peines de prison et une peine d’inéligibilité avec exécution provisoire, s’est à dire sans possibilité de faire appel pour suspendre ou casser le jugement. Marine Le Pen a estimé que le système, dernière lequel il y a la justice, le gouvernement et Emmanuel Macron, a voulu sa mort politique en créant les conditions qui l’empêcheraient de concourir à la prochaine présidentielle. Cet état d’esprit, dans lequel Marine Le Pen vacille entre déprime et désespoir, pourrait la pousser à rendre coup par coup à ce système qui veut le priver d’un destin national et donc mettre une pièce dans la machine de chaos et d’instabilité politiques voulus et désirés par la gauche incarnée par Jean Luc Mélenchon.

D’ailleurs c’est Jean Luc Mélenchon en personne qui est à l’origine d’une prophétie qui donne des frissons à la classe politique française. Celle qui consiste à prévoir que face à l’impasse politique actuelle de la France, Emmanuel Macron n’aura d’autres choix que de démissionner et organiser des élections présidentielles anticipées.

Même s’il y a une conviction installée que Macron n’est pas le genre à jeter l’éponge de cette manière, il y a une excitation collective à l’idée que non seulement le gouvernement de Michel Barnier pourrait tomber à cause d’une motion de censure mais que le pays entier pourrait vivre l’expérience inédite d’une présidentielle anticipée.

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