C’est dans l’enceinte d’une base militaire marocaine que s’est déroulée, la semaine dernière, une opération qui en dit long sur les ambitions du Royaume. Regional Endeavour 2025, deuxième du nom, a rassemblé les têtes pensantes militaires de la région sous la bannière : « Contribution militaire à la sécurité humaine : préparation et résilience ». Un exercice qui, derrière son appellation technique, cache une réalité géopolitique bien plus complexe.
Les officiers du Joint Force Command Naples ne s’y sont pas trompés. Leur présence sur le terrain, aux côtés des délégations jordaniennes, tunisiennes, égyptiennes, mauritaniennes et de l’Union africaine, témoigne d’un intérêt stratégique évident pour le théâtre d’opérations marocain. L’état-major des Forces armées royales ne cache pas sa satisfaction. Dans leur communiqué, les FAR insistent sur la « coordination opérationnelle » et « l’échange d’expertises » du vocabulaire militaire qui traduit une réalité concrète : le Maroc s’impose comme un hub logistique et tactique incontournable en Afrique du Nord.
Pour Abderrahmane Mekkaoui, expert chevronné des questions militaires, la donne a changé. « Quand on voit débarquer des officiers OTAN pour plancher sur les opérations humanitaires avec nos homologues de la région MENA, on comprend que le Maroc n’est plus seulement un partenaire, mais un multiplicateur de forces », analyse-t-il.
Le spécialiste pointe du doigt une réalité du terrain souvent négligée : « Chaque crise génère son brouillard de guerre informationnel. Les rumeurs, la désinformation, les fake news… Tout ça peut faire basculer une situation humanitaire en chaos sécuritaire en quelques heures. Les armées modernes doivent s’adapter à cette guerre hybride».
Cette approche multidimensionnelle, les FAR semblent l’avoir intégrée dans leur doctrine opérationnelle. Un atout qui ne passe pas inaperçu dans les couloirs du Pentagone ou des quartiers généraux européens.
Sur le terrain, les chiffres parlent d’eux-mêmes. Mohammed Shakir, fin connaisseur des enjeux militaires, dresse un constat sans appel : « Entre African Lion avec les Américains, les exercices conjoints avec les Européens, et maintenant Regional Endeavour, les FAR accumulent un capital expérience considérable ».
L’expert souligne une évolution majeure : « Le Maroc ne subit plus les événements, il les anticipe et s’y prépare. Du Sahel aux tensions méditerranéennes, en passant par les axes de communication stratégiques, le Royaume a compris qu’il fallait être présent sur tous les fronts ».
Cette montée en puissance ne doit rien au hasard. Modernisation de l’arsenal, développement de l’industrie de défense locale, partenariats technologiques diversifiés… « On assiste à une véritable transformation des forces », observe Shakir. Dans un contexte international tendu – du front ukrainien aux tensions au Proche-Orient -, le positionnement marocain prend tout son sens. « Le Royaume capitalise sur sa stabilité institutionnelle et sa profondeur stratégique pour s’imposer comme un acteur crédible », résume l’expert.
Face aux menaces asymétriques qui caractérisent le nouveau panorama sécuritaire mondial, le Maroc semble avoir choisi sa voie : celle d’un leadership régional assumé par la coopération militaire multilatérale.
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