C’est un hommage numérique qui a viré à la controverse. Le concert en hologramme d’Abdel Halim Hafez, présenté le lundi 23 juin 2025 dans le cadre de la 20ᵉ édition du festival Mawazine – Rythmes du Monde, a provoqué la fureur de la famille du défunt artiste, qui dénonce une “atteinte grave à sa mémoire” et une “mascarade artistique”.
Prévu comme un moment fort du festival, le spectacle avait pour ambition de faire revivre l’un des plus grands noms de la chanson arabe grâce à la technologie. Mais la réalisation n’a pas été à la hauteur des attentes. L’image holographique d’Abdel Halim, jugée floue, pâle, et parfois tronquée, a suscité l’incompréhension du public. L’apparition de l’artiste avec “la moitié du corps” visible a même déclenché des rires gênés dans la foule.
La famille ne décolère pas. Dans un communiqué, elle dénonce une “image cartoonesque déformée” du chanteur.
“Ils ne se sont pas contentés de le montrer de façon irréaliste, ils l’ont fait apparaître avec un demi-corps, dans une scène qui a suscité moqueries et mécontentement”, a dénoncé la famille.
Mais au-delà de l’aspect technique, c’est surtout l’absence de consentement légal qui choque. “La famille n’a donné aucune autorisation à l’entreprise qui a produit le spectacle”, rappelle le communiqué, ajoutant que cette société est “non fiable” et qu’un précédent projet en 2021 avait déjà été refusé pour des raisons similaires.
Selon les proches du chanteur, aucune discussion n’a été engagée avec les organisateurs du festival ni avec une quelconque société de production pour utiliser le nom, l’image ou la voix de l’artiste.
“Tous les droits exclusifs liés à Abdel Halim Hafez sont détenus par une société unique, liée à nous par un contrat officiel”, souligne la famille, qui annonce des poursuites au Maroc et en Égypte.
Face à cette réaction, Maroc Cultures, l’association organisatrice de Mawazine, a rapidement réagi pour défendre la légalité du projet.
Dans un communiqué, elle affirme que “toutes les démarches légales relatives à la production de ce spectacle ont été rigoureusement respectées”.
“Le concert a été autorisé par l’instance officielle détenant les droits d’exploitation de l’image, de la voix et des œuvres de l’artiste”, souligne-t-elle.
L’association souligne également que depuis sa création, le festival “respecte la loi et les droits des créateurs et de leurs ayants droit”. Elle justifie le recours à l’hologramme par une volonté de “mettre en valeur l’héritage artistique de la région à travers des approches innovantes, sans transgresser les valeurs éthiques et juridiques”.
“Ce concert avait pour seul but de rendre hommage à une icône de la chanson arabe, dans un cadre digne de sa place dans la mémoire collective”, a-t-elle souligné.
Malgré cette volonté affichée, le résultat n’a pas convaincu. Les spectateurs, venus nombreux pour redécouvrir les classiques comme Gabbar, Zay el Hawa ou Hobak Nar, ont fait part de leur déception sur les réseaux sociaux. Le contraste avec l’expérience réussie d’Oum Kalthoum en hologramme lors de l’édition précédente n’a fait qu’aggraver la comparaison.
Entre accusations juridiques et débats sur la légitimité des hommages technologiques, le cas Abdel Halim Hafez relance la question sensible de l’exploitation posthume des grandes figures artistiques. Pour sa famille, ce qui devait être un hommage s’est transformé en scandale.
“Ce qui s’est passé est une honte qui restera une tache dans l’histoire du festival”, conclut-elle, accusant la direction de Mawazine d’avoir “porté atteinte à l’art arabe et à ses icônes”.
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