Le prestigieux Festival Mawazine est au cœur d’une tempête médiatique et judiciaire après la révélation d’un conflit ouvert avec la société XtendVision Entertainment SARL, détentrice exclusive des droits mondiaux liés à l’image du légendaire chanteur Abdelhalim Hafez. Dans un communiqué officiel publié le 24 juin, XtendVision accuse l’Association Maroc Cultures, organisatrice du festival, d’avoir utilisé l’image de l’artiste sans autorisation, et annonce des poursuites judiciaires au Maroc, en Égypte et aux Émirats Arabes Unis. La famille d’Abdelhalim, représentée par XtendVision, réclame un million de dollars de dommages.
L’affaire trouve son origine dans un projet ambitieux présenté par XtendVision en janvier 2025. Il s’agit d’un concert holographique inédit baptisé Halim : L’Expérience du Concert Holographique Interactif. Le spectacle, décrit comme une première mondiale, combinait la projection 3D ultra-réaliste du défunt chanteur, un véritable orchestre symphonique jouant en direct et une conférence de presse interactive en hologramme, grâce à la technologie exclusive HoloVision Elite Holobox, explique la société dans un communiqué parvenu à Hespress FR.
Le projet devait d’abord se tenir à Casablanca, au Complexe Mohammed V, explique la même source, mais à la demande de l’Association Maroc Cultures, l’idée d’intégrer le projet dans la programmation du Festival Mawazine a été proposée. Une présentation détaillée a été remise à Monsieur Mostafa Farissi, accompagnée de preuves documentées des droits exclusifs concédés à XtendVision par les ayants droit légaux d’Abdelhalim Hafez, explique la société.
Le directeur du festival, Mostafa Farissi, aurait même suggéré de programmer deux représentations au Grand Théâtre de Rabat, avec possibilité d’une troisième à l’OLM Souissi.
XtendVision affirme avoir remis à Farissi des documents officiels prouvant la titularité des droits d’image d’Abdelhalim, et reçu un accord de principe. Mais à la surprise générale, les engagements pris auraient été modifiés unilatéralement. Le projet a été déplacé au Théâtre Mohammed V, une salle jugée inadaptée à la complexité technologique du spectacle. « Ce théâtre ne peut techniquement accueillir un tel projet. Le Grand Théâtre était une condition non négociable », souligne le Directeur Général de XtendVision.
En outre, l’équipe technique n’aurait eu droit qu’à un seul jour d’accès à la salle, alors que la production nécessitait au moins quatre à cinq jours complets de préparation. Devant ce qu’elle qualifie de désorganisation flagrante, XtendVision a retiré officiellement le projet.
Mais le véritable scandale a éclaté le 8 juin, lorsque la société a appris que le Festival Mawazine maintenait un concert holographique d’Abdelhalim, produit cette fois par New Dimension Productions (NDP), une société basée à Dubaï. Or, cette même société avait obtenu en 2021 une licence temporaire limitée à trois représentations, licence révoquée depuis pour avoir porté atteinte à l’image de l’artiste.
« Ils ont transformé Abdelhalim en caricature. Il ressemblait à un clown en costume jaune », a dénoncé Mohamed Chabana, membre de la famille du chanteur.
Le 9 juin, XtendVision a adressé des mises en demeure officielles à Maroc Cultures et à NDP, leur intimant de renoncer au spectacle prévu. En réponse, l’avocat de Maroc Cultures a pris contact avec le service juridique de XtendVision, sans que cela ne débouche sur un accord. Pire encore, le spectacle a été annoncé de façon soudaine pour le 23 juin, empêchant toute action judiciaire d’urgence durant le week-end.
XtendVision annonce aujourd’hui qu’elle engagera des poursuites contre Maroc Cultures et toutes les personnes impliquées dans le transfert illégal du projet. En parallèle, les ayants droit d’Abdelhalim réclament un million de dollars d’indemnisation pour atteinte à ses droits posthumes.
La même société met aussi en lumière l’absence de cadre juridique clair au Maroc concernant les droits des artistes après leur décès. « Notre objectif n’a jamais été d’aller en justice. Nous voulions simplement que les règles soient respectées », déplore la société, notant qu’ « il ne s’agit pas seulement de pertes financières — il s’agit avant tout de respecter et de préserver un héritage artistique et historique ».
XtendVision prévoit d’annoncer une tournée officielle au Maroc, incluant Casablanca, Rabat, Tanger et Marrakech, avec le spectacle original, réalisé dans les règles de l’art et avec l’accord formel de la famille Hafez. Une manière de rappeler que l’art, aussi novateur soit-il, ne peut s’affranchir du respect dû à ses icônes.
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