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Secrétaire général et chercheur associé à NejMaroc, enseignant chercheur à l’Université Lumière Lyon II, chercheur associé à la Benemérita Universidad Autónoma de Puebla au Mexique, conférencier et spécialiste des questions de relations internationales, géopolitique, intelligence économique et diplomatie, Yassine El Yattioui a entrepris une analyse approfondie des relations entre le Maroc et la France dans un entretien accordé à Hespress FR.
Grâce à ses réponses détaillées, El Yattioui nous offre une perspective éclairante sur cette relation bilatérale, soulignant les multiples domaines qui unissent ces deux partenaires historiques, surtout à la suite du soutien de Paris à la marocanité du Sahara. L’expert explore également les implications de cette décision, en exposant son impact sur les relations entre les deux pays.
Comment évaluez-vous la relation actuelle entre le Maroc et la France ?
Depuis la signature du partenariat d’exception en octobre 2024, la relation entre le Maroc et la France a enregistré une intensification sans précédent dans les dimensions politique, économique, sociale et culturelle.
Sur le plan économique, les échanges bilatéraux ont atteint 14,3 milliards d’euros entre octobre 2024 et mars 2025, soit une croissance de 8,5% par rapport à la période équivalente de l’année précédente. Les exportations françaises vers le Maroc se sont élevées à 7,9 milliards d’euros, concentrées principalement dans les secteurs de l’aéronautique, de l’automobile, de l’énergie renouvelable et de l’agroalimentaire.
En sens inverse, les exportations marocaines à destination de la France ont totalisé 6,4 milliards d’euros, avec une progression notable des ventes de phosphates transformés et de produits textile-habillement. Cette dynamique témoigne de la complémentarité croissante des économies des deux pays et d’un renforcement de la chaîne de valeur euro-méditerranéenne.
Sur le front des investissements directs étrangers, la France a engagé 3,2 milliards d’euros de nouveaux projets au Maroc depuis octobre 2024, portant le stock d’IDE français à 8,9 milliards d’euros début avril 2025. Ces engagements concernent notamment cinq méga-projets : la construction de la centrale thermosolaire de Ouarzazate II par EDF, l’extension de l’usine Renault Tanger Med 2, la création d’un parc industriel pour les énergies vertes à Safi, le développement d’un pôle logistique à Nouaceur par CMA CGM et l’implantation d’un centre de recherche en hydrogène vert à Guelmim.
Ces projets devraient générer plus des dizaines de milliers d’emplois directs et indirects d’ici fin 2026, et contribuer à la transition énergétique et numérique du Royaume, référence absolue sur le plan continental et international à travers cette problématique.
Sur le plan politique, le partenariat d’exception a été marqué par une activité diplomatique soutenue : onze rencontres bilatérales de haut niveau se sont tenues entre Rabat et Paris, impliquant successivement la visite de ministres marocains en France et leurs homologues français au Royaume. Chacune de ces réunions a débouché sur la signature de protocoles dans des domaines aussi variés que la défense, la culture, la santé, l’éducation et la justice. La création d’un Conseil stratégique commun chargé de piloter la mise en œuvre des accords, composé de six hauts fonctionnaires de chaque pays, a permis d’accélérer la coordination et de lever les principaux points de blocage en moins de six semaines.
Le volet social n’a pas été en reste. La délivrance de visas étudiants pour les Marocains a augmenté de 27% entre octobre 2024 et février 2025, permettant à 15.600 nouveaux étudiants marocains de rejoindre les universités et grandes écoles françaises. Parallèlement, 3.800 étudiants français ont effectué des semestres d’échange au Maroc, témoignant d’une réciprocité renforcée. Sur le plan de la mobilité professionnelle, les autorisations de travail ont connu une hausse de 22% pour les jeunes diplômés marocains, reflétant la confiance mutuelle dans les compétences et l’apport réciproque des deux marchés du travail.
Enfin, l’adhésion de l’opinion publique n’a jamais été aussi élevée. Selon un sondage mené en février 2025, 68% des Marocains interrogés estiment que la France apporte un bénéfice net au développement du royaume, tandis que 72% des Français considèrent que le Maroc est un partenaire stratégique incontournable en Méditerranée. Cette perception positive est un indicateur clé de la durabilité de la relation bilatérale et de son ancrage dans l’adhésion des sociétés civiles.
Le soutien de la France à la marocanité du Sahara a été l’un des principaux éléments ayant permis le renforcement des relations entre les deux partenaires historiques. A votre avis, comment ce soutien pourrait-il évoluer ?
La déclaration conjointe du président français et de SM le Roi Mohammed VI en octobre 2024 a marqué une évolution majeure de la position française sur la question du Sahara marocain. La mention explicite de l’autonomie sous souveraineté marocaine comme cadre de résolution a constitué pour Rabat un palier symbolique et politique.
Concrètement, la France a mis en place un Fonds de solidarité régional doté de 180 millions d’euros pour soutenir les programmes de développement dans les provinces du Sud. Ce fonds a déjà financé huit projets structurants, dont deux usines solaires, un centre de formation aux métiers portuaires à Dakhla, un pôle de santé communautaire à Laâyoune et la modernisation de l’aéroport Hassan Ier.
Par ailleurs, l’Agence française de développement a approuvé un prêt concessionnel de 45 millions d’euros pour améliorer l’accès à l’eau potable et l’irrigation dans la province de Guelmim-Oued Noun. Ce prêt, assorti d’un taux d’intérêt de 0,5%, s’inscrit dans le cadre du plan intégré de développement régional adopté en novembre 2024, qui vise à réduire de 35% la vulnérabilité hydrique d’ici 2030.
En diplomatie multilatérale, la France a activement soutenu le Maroc au sein des Nations unies et de l’Union pour la Méditerranée, en votant à trois reprises depuis octobre 2024 contre les résolutions soutenant l’organisation d’un référendum d’autodétermination tel que revendiqué par l’organisation fallacieuse du Front Polisario. Cette posture diplomatique a contribué à isoler progressivement ce dernier et à encourager de nouveaux pays africains et arabes à ouvrir des consulats dans les villes du Sud, au nombre de 30 à ce jour.
Au-delà des financements publics, le secteur privé français a également joué un rôle accru. Entre novembre 2024 et janvier 2025, cinq entreprises françaises – Engie, Bouygues, Vinci, Saint-Gobain et Schneider Electric – ont signé des partenariats pour des investissements directs dans les provinces du Sud pour un montant cumulé de 220 millions d’euros, principalement dans les secteurs de l’énergie renouvelable, de la construction et de l’eau. Ces accords traduisent une solidarité économique concrète avec les orientations stratégiques marocaines et renforcent la souveraineté nationale dans les régions concernées.
En quoi cette position de la France a-t-elle influencé la dynamique régionale en Afrique du Nord, notamment vis-à-vis de l’Algérie et du Front Polisario ?
La clarification de la position française a profondément modifié la géopolitique en Afrique du Nord. Dès décembre 2024, l’Algérie a rappelé son ambassadeur à Paris, marquant un point d’orgue des tensions. Les échanges commerciaux algéro-français ont baissé de 14% au cours des cinq derniers mois, passant de 6,8 à 5,8 milliards d’euros. Cette contraction s’est principalement faite dans le secteur de l’énergie, où la France importait auparavant 60% de son gaz algérien.
Par contraste, le commerce franco-marocain a poursuivi sa croissance, renforçant l’idée d’un rééquilibrage régional. Par ailleurs, la France et le Maroc ont lancé en janvier 2025 un partenariat de sécurité maritime en Méditerranée occidentale, impliquant huit frégates et dix patrouilleurs de chaque côté pour lutter contre la contrebande et la migration clandestine. Ce partenariat, inédit par son échelle, traduit la confiance stratégique mutuelle et consolide le rôle du Maroc comme pilier de la stabilité régionale.
Sur le plan diplomatique, la majorité des pays de la Communauté des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ont salué la position française, estimant qu’elle favorisait la paix et la coopération transfrontalière.
Cette érosion du soutien international pour le Polisario fragilise ses capacités de négociation et incite ses dirigeants à envisager un retour à la table des négociations sous l’égide de l’ONU dont la volonté américaine et britannique de statuer le Front comme « organisation terroriste ».
Quelles sont, selon vous, les perspectives d’avenir pour les relations maroco-françaises dans les prochaines années ?
À l’horizon 2027, les relations maroco-françaises devraient s’appuyer sur la consolidation du partenariat stratégique, la poursuite des grands projets structurants et l’essor d’une coopération de codéveloppement. Sur le plan politique, la France pourrait proposer la création d’un « pacte méditerranéen » associant Maroc, Espagne, Italie et Tunisie pour une réponse coordonnée aux défis climatiques, migratoires et sécuritaires. Ce pacte permettrait de mutualiser des moyens pour la gestion des flux migratoires et le financement de projets d’infrastructures transfrontalières.
Économiquement, l’extension du réseau LGV marocain à travers un prêt souverain français de 1,5 milliard d’euros est en voie de développement grâce à l’annonce Royale du jeudi 24 avril à la Gare Rabat Agdal du projet d’extension jusqu’à Marrakech et Agadir à l’horizon 2030. De même, un projet de zone franche numérique à Casablanca, cofinancé à hauteur de 200 millions d’euros, vise à accueillir 300 startups françaises et marocaines et à créer 8.000 emplois directs dans les technologies de l’information d’ici 2026.
Enfin, sur le plan humain, la généralisation d’une « carte mobilité durable » franco-marocaine – permettant aux diplômés des deux pays de travailler sans visa dans l’autre État pendant une période de deux ans – pourrait être une excellente solution de coopération win-win. Cette mesure favorisera la circulation des talents, renforcera les transferts de compétences et constituera un gage de la modernité du partenariat bilatéral.
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