Les femmes marocaines consacrent en moyenne cinq heures par jour aux tâches domestiques, représentant plus de 90% du temps alloué à ces activités. Pourtant, cette contribution essentielle, bien que cruciale pour le bien-être des foyers, demeure invisible dans les comptes nationaux, soulignant la nécessité de redéfinir la valeur du travail domestique afin de promouvoir l’égalité et l’autonomie des femmes, selon un récent Policy Brief publié par le Policy Center For the New South (PCNS).

Le Policy Brief baptisé « Le travail invisible des femmes » du chercheur Larabi Jaïdi, met en avant la valeur du travail domestique des femmes au Maroc en tant que contributeur à l’économie nationale. D’après le document, les femmes marocaines se retrouvent souvent coincées dans un cycle de travail invisible, investissant en moyenne près de cinq heures par jour aux tâches domestiques. Ce dévouement, qui représente plus de 90% du temps total dédié à ces activités dans les foyers, n’est cependant pas reconnu dans la comptabilité nationale, privant ainsi les femmes d’une juste reconnaissance de leur contribution économique.

Les données des recensements et des enquêtes Budget-temps menées par le Haut-Commissariat au Plan (HCP) en 1999 et 2012 ont servi de base à ce Policy Brief pour mettre en lumière cet apport significatif. Selon le chercheur, ces évaluations régulières permettent de suivre l’évolution des responsabilités au sein des ménages, révélant que 90% du travail domestique non rémunéré au Maroc est effectué par des femmes. Les tâches strictement ménagères comme la cuisine et le ménage occupent 4 heures et 33 minutes de leur quotidien, tandis que les hommes y consacrent seulement 43 minutes.

L’importance de valoriser ce travail domestique ne saurait être sous-estimée. Bien que les méthodes utilisées pour évaluer la valeur monétaire de ces activités varient, elles affichent toutes une reconnaissance de l’importance de cette production dans le PIB national. Selon le HCP, en 2012, la valeur du travail domestique pourrait atteindre 285 milliards de dirhams, représentant 34,5% du PIB, voire 513 milliards de dirhams, équivalant à 62% du PIB si l’on retient le salaire horaire moyen.

Historiquement, les services fournis par les femmes, qu’il s’agisse du travail domestique, du bénévolat ou de la production de subsistance, sont souvent invisibles dans les statistiques économiques, a poursuivi Jaïdi. Ce phénomène d’ignorance systémique alimente une perception erronée que le partage des tâches entre hommes et femmes est équilibré, alors qu’il met en lumière une inégalité de genre persistante. En conséquence, les contraintes liées aux rôles traditionnels des femmes limitent leur accès à des opportunités économiques, provoquant un effet d’entraînement sur leur indépendance.

Au fil des années, les enquêtes sur les budgets-temps ont révélé des évolutions dans l’emploi du temps des femmes marocaines, a dévoilé le Policy Brief. Entre 1997 et 2012, le temps consacré aux tâches professionnelles a augmenté de 2 heures et 44 minutes, tandis que le temps alloué aux tâches domestiques a diminué d’une heure.

Pour aborder cette question d’invisibilité du travail domestique, plusieurs méthodes d’évaluation ont été proposées. Parmi celles-ci, la méthode du « substitut global » et celle du « substitut spécialisé » permettent d’estimer la valeur du travail domestique en utilisant les salaires d’employés rémunérés, tandis que la méthode du « gain potentiel » évalue ce travail en fonction des salaires que les femmes pourraient gagner sur le marché, a expliqué la même source.

Pour le chercheur, reconnaître la valeur du travail domestique dans les comptes nationaux pourrait contribuer à promouvoir des politiques publiques plus équitables et améliorer le statut des femmes. Une telle intégration permettrait de mieux saisir leur apport à l’économie nationale et serait une étape essentielle vers la réduction des inégalités de genre.

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