Sur TikTok, les vidéos s’enchaînent avec des slogans accrocheurs : « Nouveau sourire au Maroc en 3 jours ! », « Facettes à partir de 1.250 € avec vol et hôtel inclus!». Le phénomène du tourisme dentaire express explose, notamment auprès d’une clientèle européenne jeune, attirée par des forfaits tout compris mêlant soins médicaux, séjour touristique et économies substantielles.

Mais cette tendance, qui fait le bonheur de certaines agences spécialisées dans les soins à l’étranger, inquiète de plus en plus les professionnels du secteur dentaire. En Espagne, le Conseil général des dentistes a récemment lancé un avertissement officiel, dénonçant une pratique « hasardeuse » et potentiellement dangereuse pour la santé des patients.

Or, il convient de nuancer. Le Maroc, où sont réalisés bon nombre de ces soins, ne manque pas de praticiens compétents, diplômés de grandes universités et exerçant dans des cliniques de haut niveau, respectant scrupuleusement les normes internationales. Le problème, soulignent plusieurs professionnels marocains eux-mêmes, ce n’est pas le pays ni ses dentistes, mais la prolifération de certaines structures commerciales opérant en marge du circuit médical officiel, et attirant les clients via des campagnes virales sur les réseaux.

« Se rendre à l’étranger pour une intervention médicale n’est pas une aventure, c’est une imprudence », déclare sans détour le président du Conseil, le Dr Óscar Castro Reino. Il rappelle que des actes comme la pose de facettes composites, très en vogue sur les réseaux, nécessitent une évaluation personnalisée, une préparation rigoureuse, un matériel de qualité et surtout, un suivi post-opératoire – choses rarement compatibles avec un séjour de quelques jours.

Selon lui, ces traitements réalisés à la chaîne, sans diagnostic approfondi ni planification adéquate, peuvent entraîner de sérieuses complications : douleurs, sensibilité accrue, infections, dégradation des gencives, voire perte prématurée des dents. « La santé bucco-dentaire est un domaine complexe. La négliger pour des raisons économiques ou esthétiques immédiates est un pari risqué », prévient-il.

L’autre inquiétude concerne le cadre réglementaire. Si des pays comme l’Espagne imposent une inscription obligatoire des praticiens au registre professionnel, des contrôles réguliers des cliniques, et des protocoles stricts en matière de biosécurité, ce niveau d’exigence n’est pas toujours garanti à l’étranger. Le flou juridique entourant certaines offres, notamment dans les pays à réglementation plus souple, laisse planer le doute sur la qualification des intervenants et la salubrité des infrastructures.

Dans un contexte où les soins dentaires sont de plus en plus chers en Europe, l’attrait pour des destinations comme le Maroc est compréhensible. Mais les professionnels insistent : le choix d’un praticien ne devrait jamais se baser uniquement sur une vidéo TikTok ou un prix alléchant. « On ne peut pas confondre loisirs et santé », martèle le Dr Castro Reino. « Toute intervention médicale, même esthétique, doit être réalisée dans un cadre professionnel, sécurisé, et avec une transparence totale sur le suivi ».

Face à l’emballement viral et au développement d’un marché parallèle du tourisme dentaire express, un seul mot d’ordre pour les patients : informer, vérifier, et ne jamais sacrifier la santé au profit de l’apparence ou d’un billet d’avion.

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