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Une étude récente, menée par le Réseau marocain des journalistes des migrations, met en lumière de profondes dérives dans la manière dont les médias marocains traitent les questions migratoires. Le rapport dénonce une prépondérance du discours discriminatoire dans de nombreuses couvertures, ainsi qu’une approche superficielle, manquant d’analyse et de profondeur.
À ce sujet, Dounia Zineb Mseffer, présidente du Réseau, souligne que les conclusions de cette étude traduisent une nécessité urgente de repenser l’approche médiatique des enjeux migratoires, en particulier dans un contexte de tensions croissantes et de complexité accrue entourant ces thématiques.
Dans une déclaration accordée à la presse, Mseffer précise que cette étude, conduite sous la supervision du journaliste et universitaire Mohamed Karim Boukhsas, s’est basée sur l’analyse de 184 articles journalistiques publiés dans 31 médias marocains, sur une période allant de décembre 2023 à juin 2024.
Elle indique que 85 % de ces contenus appartiennent au registre informatif, ce qui révèle une tendance marquée à un traitement rapide et superficiel de l’information, sans réel travail d’enquête ou de terrain. Les investigations approfondies, les reportages ou les approches immersives sont ainsi quasi absents du paysage analysé.
L’étude révèle également la prévalence de stéréotypes et de propos discriminatoires, en particulier dans les traitements portant sur la migration subsaharienne. « Lorsqu’il est question d’infractions présumées, les médias mettent systématiquement l’accent sur l’origine des personnes impliquées », précise Mesfer, estimant que cette pratique renforce une généralisation négative et présente les migrants comme des menaces sécuritaires.
Ce type de narration, avertit-elle, « nuit au tissu social, alimente les peurs collectives et creuse le fossé entre citoyens et migrants ».
La présidente du Réseau déplore en outre la quasi-invisibilité des femmes migrantes et des personnes en situation de vulnérabilité dans la presse. Sur les 184 articles analysés, seules trois publications les mentionnent, soit moins de 2 % du total. Un chiffre qu’elle qualifie de révélateur : « Cela reflète une exclusion manifeste de catégories sociales qui ont pourtant besoin de tribunes médiatiques pour exposer leurs réalités et exprimer leurs souffrances ».
Autre point de critique majeur : la dépendance excessive aux sources officielles, qui représentent 45 % des références utilisées dans les articles, contre seulement 13,5 % pour les experts et 3 % pour les migrants eux-mêmes. Un déséquilibre que Mseffer qualifie de préoccupant : « L’absence de la voix des migrants dans les médias marocains prive la couverture de sa dimension humaine et transforme le récit en un discours vertical, déconnecté du vécu ».
Selon elle, ce déséquilibre se traduit également par une focalisation disproportionnée sur la migration irrégulière, qui représente 72 % des sujets abordés, reléguant au second plan d’autres réalités migratoires comme la migration régulière ou les parcours d’intégration.
La couverture médiatique accorde par ailleurs une large place aux aspects sécuritaires et au contrôle des frontières, évoqués dans 49 % des articles, alors que seuls 17 % abordent la question des droits humains, et à peine 9 % traitent de l’intégration des migrants.
Mseffer s’inquiète également de la redondance des récits journalistiques, marqués par le recyclage des mêmes narratifs dans la plupart des supports analysés. Un constat qu’elle associe à une perte d’originalité et à un affaiblissement du rôle critique de la presse. « Ce modèle répétitif empêche l’émergence d’un discours médiatique équilibré et constructif, et contribue à l’enracinement des stéréotypes », explique-t-elle.
La présidente du Réseau attire aussi l’attention sur la montée inquiétante des discours de haine sur les réseaux sociaux, souvent alimentés par « des groupes réduits mais particulièrement actifs, qui exploitent une rhétorique mêlant xénophobie et emprunts idéologiques à des contextes politiques étrangers ».
Selon elle, cette situation est le fruit d’un manque de formation journalistique spécialisée, de l’absence de ligne éditoriale claire, ainsi que de la régression des libertés de la presse et de l’emprise croissante du discours officiel sur les thématiques liées à la migration.
Enfin, Mseffer affirme que cette étude constitue « un appel pressant à repenser en profondeur la manière dont les médias marocains traitent la migration », en adoptant une approche à la fois professionnelle et humaine, où la dignité des personnes migrantes est placée au cœur des préoccupations journalistiques.
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