Avec 81% d’utilisateurs, le Maroc peut se targuer d’une forte pénétration des réseaux sociaux. Mais à y regarder de plus près, le pays vit une transition numérique à deux vitesses, où les grandes plateformes consolident leur position pendant que d’autres peinent à suivre. Et surtout, où une part non négligeable de la population reste exclue de la vie digitale.

Pour la sixième année consécutive, le baromètre des réseaux sociaux au Maroc, élaboré par le groupe Sunergia, livre un état des lieux détaillé des usages digitaux dans le Royaume. L’édition 2025 confirme que les réseaux sociaux occupent une place centrale dans la vie quotidienne des Marocains. Pourtant, derrière l’adhésion massive, 81% des citoyens sont utilisateurs, se cachent des dynamiques complexes, des évolutions marquées, et des fractures persistantes.

Le trio de tête des réseaux sociaux les plus utilisés au Maroc reste inchangé en 2025. WhatsApp conserve sa première place avec 75% d’utilisateurs, confirmant sa position dominante dans les usages quotidiens des Marocains. Facebook, malgré une légère érosion, occupe toujours la deuxième place avec 62%, tandis qu’Instagram complète le podium avec 42% d’utilisateurs.

Sur la période 2020-2025, ces plateformes ont enregistré une progression significative, traduisant leur ancrage durable dans le paysage numérique national. Toutefois, les données les plus récentes indiquent un ralentissement de cette dynamique. Instagram affiche une timide hausse de 2 points, tandis que WhatsApp et Facebook accusent des baisses respectives de 1 et 3 points, sans pour autant modifier l’ordre établi.

La grande surprise de l’année, d’après le baromètre, est YouTube qui a fait son entrée dans le classement et s’est installé directement à la 4e place, avec 40% d’utilisateurs. Une percée qui souligne la montée en puissance du format vidéo long, alors que TikTok, en 5e position avec 24%, continue sa progression rapide. En seulement cinq ans, la plateforme chinoise a connu une envolée remarquable, passant de 5% en 2020 à près d’un quart des usagers aujourd’hui.

Au-delà du top 5 des réseaux sociaux, les usages des plateformes challengers au Maroc semblent marquer le pas. Snapchat et Telegram se partagent la sixième place avec un taux d’utilisation de 8% chacun, une stabilité qui contraste avec la dynamique observée chez les leaders du classement. Derrière eux, LinkedIn affiche 6%, X (anciennement Twitter) atteint 5%, et Pinterest ferme la marche avec 4% d’utilisateurs.

Certaines de ces plateformes, à l’image de LinkedIn, parviennent à progresser modestement en s’appuyant sur des usages de niche, notamment dans les sphères professionnelles. D’autres, en revanche, peinent à se réinventer ou à séduire de nouveaux publics. Faute de stratégie claire ou d’innovation marquante, elles restent à la traîne dans un environnement numérique en constante évolution.

D’une autre part, si les réseaux sociaux connaissent une adoption massive dans les zones urbaines, en particulier chez les jeunes de 18 à 24 ans et les catégories socio-professionnelles supérieures (CSP+), une fracture numérique continue de se creuser. Une part importante de la population reste en marge de cette révolution digitale. Le profil type du non-connecté est souvent celui d’un senior âgé de 55 ans ou plus, vivant en zone rurale et appartenant à une catégorie socio-économique D-E.

Chez les personnes âgées de 64 ans et plus, 47% ne sont pas utilisateurs de réseaux sociaux. Ces citoyens « hors ligne », qu’ils soient déconnectés par contrainte ou par choix, échappent aux algorithmes, ne scrollent pas, ne postent pas, ne likent pas.

Par ailleurs, les plateformes investissent massivement dans l’IA pour maintenir l’attention des utilisateurs. Recommandations algorithmiques, modération automatisée, contenus générés par l’IA, les réseaux sociaux se réinventent pour rester compétitifs. Mais cette transformation, si elle séduit les jeunes urbains, ne suffit pas à combler les écarts d’usage.

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