Au Maroc, le stress devient un mal du siècle. La sophrologie, encore méconnue, propose des solutions concrètes. Dans un entretien accordé à Hespress FR, Sophia Chioua, sophrologue certifiée, nous éclaire sur cette pratique qui aide les Marocains à retrouver calme et équilibre intérieur.
Selon un sondage Averty de 2022, près de 70 % des Marocains affirmaient se sentir stressés au quotidien, principalement en raison de la surcharge de travail, des incertitudes économiques ou encore des tensions familiales.
Dans les grandes villes comme Casablanca ou Rabat, cette pression psychologique est exacerbée par un rythme de vie effréné. Face à ce mal-être diffus, de nouvelles approches émergent, et parmi elles : la sophrologie, une discipline encore peu connue mais en plein essor. Sophia Chioua, sophrologue diplômée de l’IFS Paris, installée entre Casablanca et Rabat, en est l’une des figures montantes.
Rien ne prédestinait Sophia Chioua à cette reconversion dans l’accompagnement individuel. Elle commence sa carrière dans le domaine des ressources humaines, qu’elle exercera durant près de huit ans.
Peu à peu, le besoin d’un changement s’impose. Déjà adepte de yoga et de méditation dans sa vie personnelle, elle découvre la sophrologie comme une évidence : « Une méthode complète, qui allie respiration, mouvement et visualisation, et qui permet de se recentrer, de mieux se connaître, de retrouver un équilibre intérieur ».
Elle se forme alors à Paris, et en 2023, devient sophrologue certifiée. Elle commence à proposer des séances individuelles et des ateliers à Casablanca et Rabat.
Avant même d’en faire son métier, Sophia expérimente la sophrologie sur elle-même. Une blessure au genou avec rupture des ligaments croisés, suivie d’une opération, devient un tournant : « J’ai pu gérer la douleur, me préparer à la chirurgie, calmer mon stress et accompagner ma récupération. Cette expérience m’a montré à quel point cette méthode pouvait être puissante ».
Elle décide alors de la partager au plus grand nombre. Depuis, elle accompagne des enfants, des adultes, des sportifs ou encore des seniors, dans des sphères variées — personnelles, familiales ou professionnelles.
La sophrologie, c’est quoi exactement ?
Contrairement à ce que son nom complexe pourrait laisser croire, la sophrologie est une méthode simple, structurée et accessible. Développée dans les années 1960 par le Dr Alfonso Caycedo, elle repose sur une idée forte : l’harmonie entre le corps et l’esprit.
« C’est une thérapie brève, orientée vers des objectifs concrets, qui agit sur le système nerveux grâce à des exercices simples : respiration, relaxation musculaire, visualisation mentale« .
Sophia aime présenter la sophrologie comme un « biohacking naturel », car elle permet d’optimiser ses ressources mentales et physiques sans médication ni appareils.
« Elle s’inspire de plusieurs disciplines : l’hypnose pour la détente, le yoga pour la conscience corporelle, la méditation pour le recentrage, mais aussi des techniques occidentales comme la relaxation de Jacobson ou le training autogène de Schultz ».
« L’objectif est que chaque personne reparte plus apaisée, recentrée, avec des outils concrets à réutiliser dans son quotidien. D’ailleurs apres chaque séance, j’envoie à mes clients les fiches des exercices et les audios des visualisations pour une pratique à la maison », explique-t-elle.
Ce type d’exercice permet de rééquilibrer le fonctionnement du corps, notamment au niveau du diaphragme et des organes digestifs, qui sont souvent bloqués en période de stress. En régulant la respiration, on rétablit l’harmonie corporelle, ce qui permet de mieux gérer les émotions et d’éviter les crises de panique.
Une pratique ouverte à tous, un retour au calme
L’un des grands atouts de la sophrologie : elle est ouverte à tous. Enfants, adolescents, adultes, seniors… il n’y a pas d’âge pour apprendre à mieux respirer ou à gérer son stress. Elle peut être pratiquée en individuel ou en groupe, selon les besoins.
En entreprise, les demandes sont de plus en plus fréquentes : gestion du stress, prévention du burn-out, amélioration de la qualité de vie au travail. Dans le domaine scolaire, elle intervient pour améliorer la concentration ou gérer l’angoisse des examens. Sophia collabore aussi avec des hôpitaux ou des centres de santé pour accompagner des patients dans la gestion de la douleur ou du stress médical.
Les témoignages qu’elle recueille parlent d’eux-mêmes. Comme ce cadre de 30 ans, récemment promu, qui souffrait d’un sommeil chaotique et de douleurs digestives dues au stress. « Grâce à la sophrologie, il a pu instaurer une routine de régulation, améliorer sa santé mentale, et retrouver confiance en lui », Ou cette adolescente joueuse de tennis, qui devait apprendre à canaliser son stress en compétition : « La sophrologie lui a permis d’améliorer sa concentration et ses performances ».
Autre exemple : un homme confronté à un diagnostic médical lourd, avec douleurs chroniques, a pu retrouver sérénité et maîtrise grâce à la respiration consciente et à la visualisation positive.
Chaque séance dure en moyenne une heure, en trois temps : Accueil et dialogue, pour cerner les besoins du moment, pratique guidée : respiration, mouvements doux, relaxation, visualisation, et artage libre, où chacun peut exprimer ses ressentis
Sophia accompagne ses clients dans une dynamique d’autonomie. Dès la première séance, on peut ressentir un apaisement, une meilleure respiration. Mais pour un changement durable, il faut en moyenne entre 5 et 8 séances, avec une pratique régulière. »
La sophrologie au Maroc : un tournant prometteur
Au Maroc, la sophrologie reste une discipline encore émergente, mais qui séduit de plus en plus de personnes, dans un contexte de recherche active de solutions naturelles au stress.
« Il y a une réelle montée en conscience sur l’importance du bien-être mental. Et la sophrologie y répond de façon simple, douce, et accessible », nous explique notre interoluctrice.
Elle souligne aussi l’intérêt croissant dans les entreprises : « Il devient indispensable d’intégrer la santé mentale dans les environnements de travail ».
Face aux hésitations de certains, Sophia propose simplement de tester, et « commencer par des exercices simples de respiration peut suffire à ressentir les effets ». La sophrologue cite d’ailleurs Luis Enrique, ex-entraîneur du FC Barcelone, aujourd’hui au PSG : « Lui aussi recommande la sophrologie comme un entraînement pour optimiser les performances, dans le sport comme dans la vie personnelle ».
« Prendre soin de sa santé mentale est essentiel. Il n’y a pas une seule bonne méthode : certaines personnes se tournent vers un psychologue, d’autres vers un sophrologue. Les deux approches peuvent aussi être complémentaires. Parfois, on a besoin de parler, comprendre, parfois de passer par le corps, parfois les deux. L’essentiel, c’est de trouver ce qui nous fait du bien, à notre rythme », affirme-t-elle.
Ce qui m’anime, conclut Sophia Chioua, « c’est de créer des bulles de respiration dans un quotidien trop chargé. Semer un peu plus de paix et de conscience, à mon échelle ».
Dans une société où le stress est devenu un bruit de fond permanent, la sophrologie offre une pause. Un espace de recentrage. Et une clé, peut-être, pour une vie plus alignée.
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