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Léopold Sédar Senghor, l’un des plus grands poètes et hommes d'État africains, a marqué l’histoire du Sénégal et de l'Afrique avec ses idéaux de "Négritude", mais derrière cette figure majestueuse se cache un homme meurtri par des drames personnels. La perte de ses enfants, dans des circonstances tragiques, a profondément marqué l’ancien président et poète.
Francis, Guy et Philippe : des vies brisées par le destin
Senghor a été père de trois garçons, issus de deux mariages successifs. Le premier, Francis Arfang Senghor, né en 1947 de son union avec Ginette Éboué, a grandi dans l’ombre de son père, loin des privilèges qu’on pourrait attendre d’un enfant de président. Discret, humble, passionné de musique et de cinéma, Francis s’exile aux États-Unis pour poursuivre ses études, où il se lie d’amitié avec le percussionniste Mor Thiam. Francis, à l’image de son père, vivait sans fioritures, loin des feux de la rampe. Mais la vie, hélas, n’a pas été tendre avec lui non plus : après les tragiques disparitions de ses deux frères, Guy Waly et Philippe Maguilen, il se retrouve lui-même en proie à des problèmes de santé, sa vie désormais marquée par la souffrance.
Le second fils, Guy Waly Senghor, un intellectuel brillant, était un philosophe rêveur, déterminé à enseigner au Sénégal. Malheureusement, son destin a été aussi brutal que celui de son frère. En 1983, à l’âge de 36 ans, il meurt à la suite d’une chute accidentelle dans un immeuble en France. Un autre coup dur pour le président, un père dévasté par cette perte soudaine.
Philippe Maguilen Senghor : l'ultime tragédie
Mais c’est la disparition de son troisième fils, Philippe Maguilen Senghor, qui ébranle profondément le père. Le jeune homme, âgé de seulement 23 ans, trouve la mort le 7 juin 1981 dans un accident de voiture à Dakar, aux côtés de sa compagne allemande. Ce drame, qui survient alors que Senghor se trouve en France, plonge l’ex-président dans une douleur immense. Le poète, souvent silencieux sur ses propres tourments, dédie un poème poignant, l’« Élégie pour Philippe-Maguilen Senghor », à son fils disparu. Ce poème, écrit en 1983, deux ans après la tragédie, demeure l’une des œuvres les plus émouvantes de Senghor, une lettre d’adieu pleine de douleur et de mélancolie.
Pour Senghor, ces pertes successives ne sont pas que des drames personnels. Elles sont aussi des interrogations profondes sur le sens de son engagement politique et de sa vie.
Une famille marquée par la tragédie
L’histoire de la famille Senghor n’est pas seulement celle d’un homme d'État, mais aussi celle d’un père dévasté par des pertes irrémédiables. Le poète, qui a vu ses enfants s’éteindre un à un, semble avoir compris, dans les dernières années de sa vie, qu’il ne pouvait échapper à la dureté du destin. La perte de Guy, de Philippe, et les problèmes de santé de Francis, l’ont poussé à une profonde réflexion sur la vie, la politique, et la souffrance humaine.
L’union sacrée entre Senghor et Colette Hubert, mère de Philippe Maguilen, semblait prometteuse, mais elle n’aura pas protégé leur fils unique des terribles épreuves de la vie. Au-delà des luttes politiques et des combats pour l’indépendance de l’Afrique, Senghor aura porté en lui une douleur intime, celle de la perte de ses enfants.
Ainsi, derrière les discours politiques et les déclarations publiques, Senghor a vécu une existence marquée par des drames humains que seule la poésie semblait capable d’exprimer. Ses enfants, qui ont payé un lourd tribut à la malchance, ne sont plus là pour témoigner de ce qu’ils auraient pu accomplir, mais l'héritage de Senghor, lui, demeure. Son nom restera à jamais lié à la lutte pour l’Afrique, à la "Négritude", mais aussi à la tragédie d’un père qui a perdu presque tout ce qu’il aimait.
"On ne gouverne pas impunément" : le poids du destin et de la douleur
Aujourd'hui encore, cette réflexion de Senghor résonne comme un écho puissant, un rappel que même les plus grands hommes, ceux qui ont marqué l’histoire, ne sont pas à l’abri de la souffrance. Le destin tragique de ses enfants laisse une empreinte indélébile dans l’histoire personnelle de Senghor, et son appel à la réflexion sur la nature du pouvoir et de la souffrance humaine reste d’une actualité poignante.
Cette histoire, marquée par des pertes incommensurables, rappelle que derrière chaque grande figure historique se cache souvent une humanité brisée par le poids du destin. Et pour Senghor, il semble que l’accomplissement de sa mission n’ait jamais été suffisant pour compenser les souffrances personnelles qui ont marqué sa vie...