Le Festival International du Film de Marrakech a accueilli la première marocaine de Mira, le nouveau long-métrage de Nour-Eddine Lakhmari. Tourné dans les forêts d’Azrou et d’Ifrane, le film marque une rupture esthétique et thématique dans la carrière du réalisateur de Casanegra et Zéro. À travers l’histoire d’une enfant amazighe confrontée aux préjugés de son milieu, Lakhmari propose une réflexion profonde sur la liberté, l’identité et le regard que le Maroc porte sur lui-même.
La 22e édition du Festival International du Film de Marrakech a offert au public marocain une projection très attendue : celle de Mira, le nouveau film de Nour-Eddine Lakhmari, qui fait son retour au cinéma après huit ans d’absence, depuis Burn Out (2017). La salle, entièrement acquise, a longuement applaudi cette œuvre qui semble ouvrir un nouveau chapitre dans la filmographie du cinéaste.
Tourné dans les paysages majestueux d’Azrou et d’Ifrane, Mira plonge pour la première fois Lakhmari hors de Casablanca, décor emblématique de ses précédents films. Les forêts du Moyen-Atlas deviennent ici un espace organique, presque spirituel, où se déploie une histoire intimiste aux résonances universelles.
Le film réunit un casting riche, porté par Fatima Attif, Omar Lotfi, Safaa Khtami, Saad Mouaffak, Ismaïl El Fallahi, Zineb Al Jayi et Moussa Sylla.
Le titre du film, Mira, qui signifie « la cheffe » en amazigh — renvoie à l’héroïne : une fillette qui tisse un lien inattendu avec un groupe de migrants subsahariens retranchés dans la forêt, espérant un passage vers l’Europe. À travers cette relation, le film explore les tensions sociales, les préjugés, les violences symboliques et les fractures intimes d’une communauté confrontée à la pauvreté et à l’exclusion.
Lakhmari signe ici une mise en scène plus poétique, travaillant la nature, la langue amazighe, les chants et la lumière avec une sensibilité nouvelle, tout en conservant la force narrative qui caractérise son cinéma.
« Un pays ne peut être libre si sa femme ne l’est pas »
Interrogé par Hespress FR sur le thème central du film, celui de l’émancipation féminine, Nour-Eddine Lakhmari nous confie : « Mira est inspiré par quelque chose de fondamental : un pays ne peut pas être libre si sa femme ne l’est pas. Un pays ne peut pas avancer sans remise en question. Il est temps de se regarder dans le miroir, de s’accepter, de s’aimer, et de dire que cela aussi, c’est le Maroc. Le Maroc n’est pas juste un décor : c’est les Marocaines et les Marocains, et leur liberté. »
Le réalisateur poursuit : « Ce que nous offrons de générosité à notre peuple, nous le recevrons en créativité. Il faut montrer au monde que le Maroc n’est pas une carte postale folklorique, mais un peuple avec une histoire extraordinaire. »
Il a également salué l’élan des nouvelles générations : « Le festival de Marrakech est un exemple de soft power : on parle au monde entier. Le cinéma marocain avance, et il avance encore mieux grâce aux jeunes femmes qui arrivent comme réalisatrices. Elles nous libèrent de nos complexes. »
Enfin, il a tenu à rendre hommage à son équipe : « Les artistes… s’ils n’étaient pas là, nous ne serions pas là. Grâce à leur travail, leur engagement et leur amour, ce film a pu exister. »
Les acteurs saluent une expérience unique
L’actrice Safaa Khtami, qui tient l’un des rôles principaux, s’est dite « fière de travailler avec Lakhmari » et émue de présenter le film à Marrakech. Elle confie que cette expérience lui a donné l’impression de « jouer pour la première fois », tant le travail avec le réalisateur a été formateur et exigeant.
Saad Mouaffak a, lui aussi, souligné la richesse du tournage : « Toute l’équipe a énormément donné pour que le film soit à la hauteur. Le public a aimé, et c’est la plus belle récompense. »
Après Casanegra, Zéro et Burn Out, Mira marque une évolution majeure dans l’œuvre de Lakhmari : une plongée dans une nature vivante, une mise en scène plus intérieure, et une réflexion profonde sur la dignité humaine, la liberté et les fractures sociales du Maroc contemporain.
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