La libération de Boualem Sansal n’a rien d’un geste « humanitaire ». Pour le philosophe français Pascal Bruckner, elle n’est que le symptôme d’un régime algérien à genoux, étranglé par un isolement international inédit et par une série d’humiliations diplomatiques, au premier rang desquelles sa déroute sur le dossier du Sahara marocain.
Dans un entretien accordé à Le Figaro, Bruckner démonte point par point la propagande officielle d’Alger. Selon lui, le pouvoir n’a pas cédé dans l’affaire Boualem Sansal par grandeur d’âme, mais parce qu’« il avait tout perdu » : désavoué à l’ONU, lâché même par ses soutiens traditionnels ( Russes et Chinois ) et incapable de défendre sa posture historique contre la dynamique de reconnaissance internationale en faveur de la souveraineté du Maroc.
Une gifle diplomatique retentissante pour Alger
Pour le philosophe, l’échec algérien est total. Dans la bataille diplomatique autour du Sahara marocain, Alger a non seulement perdu des appuis essentiels, mais s’est retrouvée « complètement isolée ». Même les puissances qui, pendant des décennies, avaient constitué son filet de sécurité ont pris leurs distances.
Cet isolement, souligne Bruckner, a pesé lourd dans le revirement du président Abdelmadjid Tebboune : « l’Algérie s’est retrouvée seule, terriblement seule ». Une solitude aggravée par la montée en puissance de la diplomatie marocaine et par l’ancrage croissant de la position légitime du Royaume sur la scène internationale. Le philosophe est catégorique : « le grand vainqueur, c’est le Maroc ».
Un régime prisonnier de ses vieux réflexes
Bruckner ne se contente pas de décrire la défaite diplomatique d’Alger. Il dénonce également un système politique figé, « incapable de sortir mentalement de l’ère coloniale », obsédé par la France au point d’en faire un alibi permanent pour masquer ses échecs internes.
Selon lui, cette obsession est le fondement même du discours officiel algérien : un FLN qui n’a jamais digéré l’indépendance au point de ne jamais construire la suite. Le pays, dit-il, vit dans une « schizophrénie politique » où les dirigeants utilisent la France comme bouc émissaire tout en envoyant leurs familles y vivre et s’y faire soigner.
L’affaire Sansal, révélatrice d’un système autoritaire et nerveux
La détention brutale de Boualem Sansal et le traitement réservé au journaliste Christophe Gleize, toujours retenu en Algérie sont pour Bruckner la preuve que ce régime « ne supporte ni la critique, ni la liberté ». Il raconte comment la France, embarrassée, a longtemps pratiqué une diplomatie hésitante, incapable d’assumer l’évidence : Sansal n’était pas détenu pour des raisons juridiques, mais politiques.
Le philosophe va plus loin en accusant directement Alger d’antisémitisme, de paranoïa diplomatique et de pratiques d’un autre âge. Le fait que Sansal ait été emprisonné après avoir simplement rappelé que « la Sahara oriental est historiquement marocain » est pour Bruckner le symbole ultime de cette dérive autoritaire.
Une défaite que rien ne peut masquer
Malgré les tentatives du pouvoir algérien pour maquiller ce recul, la vérité est désormais mise à nu : la libération de Sansal a été imposée à Alger par la pression internationale, par Berlin, et surtout par l’incapacité du régime à supporter plus longtemps son propre isolement.
Pour Bruckner, tout s’explique par un contexte global où Rabat avance, et où Alger recule : « le Maroc est sorti grand gagnant de cet affrontement », dit-il sans détour.
Et le philosophe d’appeller même Paris à sortir de sa complaisance, qu’il juge incompréhensible. La relation franco-algérienne doit être entièrement « restructurée », affirme-t-il, estimant qu’il est temps de cesser d’accepter les insultes du pouvoir algérien tout en fermant les yeux sur ses dérives.
Une chose est sûre : la séquence Sansal a dévoilé la fragilité d’un régime qui se prétend fort mais qui, dans les faits, subit les événements plus qu’il ne les commande.
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