L’ambassadeur de Russie à Rabat, Vladimir Babyakov, est revenu, dans un entretien à Hespress, sur la résolution 2797 du Conseil de sécurité, soulignant l’attachement de Moscou à une solution politique durable au Sahara. Le diplomate met également en avant la solidité des relations maroco-russes et les perspectives de coopération ouvertes par la nouvelle feuille de route économique et culturelle.
Le Maroc avait salué l’attitude de la Russie, qui s’est abstenue lors du vote sans recourir au veto. Le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, avait qualifié cette abstention d’« élément déterminant », estimant qu’un éventuel vote négatif russe aurait pu faire tomber le texte.
Selon lui, cette position est le fruit d’un travail diplomatique soutenu entre Rabat et Moscou, du respect par la Russie de l’équilibre de la diplomatie marocaine, concernant notamment la guerre en Ukraine, ainsi que de l’estime du Kremlin pour la vision stratégique du Roi Mohammed VI.
Dans cet entretien, Vladimir Babyakov revient sur la lecture russe de la résolution, sur la dynamique bilatérale Rabat-Moscou, ainsi que sur les perspectives économiques, culturelles et éducatives entre les deux pays.
Comment la Russie interprète-t-elle la nouvelle résolution du Conseil de sécurité sur le Sahara, et quelles en sont les implications pour le processus politique onusien ?
La Fédération de Russie considère que la dernière résolution du Conseil de sécurité reflète la volonté de la communauté internationale de continuer à soutenir les efforts politiques menés par les Nations unies afin de parvenir à une solution réaliste, durable et acceptable pour toutes les parties.
Nous espérons que ce texte ouvrira la voie à une reprise d’un dialogue constructif, fondé sur la référence claire du cadre onusien et de la Charte des Nations unies.
De notre point de vue, une solution solide ne peut être atteinte que par un processus politique inclusif, tenant compte des intérêts de toutes les parties concernées. Dans ce sens, la Russie est prête à soutenir les efforts de l’Envoyé personnel du Secrétaire général visant à relancer les négociations et à atteindre l’objectif final : une résolution de ce différend.
Dans quelle mesure les positions des États membres du Conseil de sécurité, dont la Russie, reflètent-elles l’approche actuelle de la communauté internationale vis-à-vis de ce dossier ?
Il n’est jamais simple d’évaluer la position des autres pays, car chaque État agit en fonction de ses propres intérêts. Cependant, il est évident que l’ensemble des membres du CS sont concernés par la recherche d’une solution rapide permettant d’assurer une paix durable et une prospérité réelle dans la région.
Qu’est-ce qui caractérise aujourd’hui les relations entre le Maroc et la Russie, au regard des transformations régionales et internationales ?
Les relations entre la Fédération de Russie et le Royaume du Maroc sont profondément enracinées. Elles reposent sur un partenariat établi par Sa Majesté le Roi Mohammed VI et le Président Vladimir Poutine.
Elles ont résisté à l’épreuve du temps, y compris durant les périodes difficiles comme la pandémie de Covid ou les turbulences géopolitiques actuelles, et ont continué à se développer.
Les récentes discussions entre les ministres des Affaires étrangères des deux pays, ainsi que la réunion de la Commission mixte intergouvernementale, ont constitué une étape importante dans le renforcement de nos relations bilatérales.
Nous sommes convaincus, à Moscou comme à Rabat, que les accords conclus donneront une nouvelle impulsion à notre coopération multidimensionnelle.
D’une manière générale, des relations fondées sur le respect mutuel, dépourvues de calculs conjoncturels et centrées sur l’intérêt commun, peuvent être considérées comme un modèle à suivre. Elles constituent même, à juste titre, l’un des piliers du nouvel ordre international émergent, créant les conditions nécessaires à une paix durable et à la prospérité de tous les États.
Quel regard portez-vous sur l’approche marocaine fondée sur la souveraineté nationale et l’intégrité territoriale comme cadre pour une solution politique ?
La Russie accepte toute solution satisfaisant l’ensemble des parties.
Nous savons que le Maroc plaide pour une solution politique dans le cadre de sa souveraineté nationale et de son intégrité territoriale, tout en maintenant le principe d’autodétermination sous la forme d’un statut d’autonomie. C’est également ce que reflète la nouvelle résolution du Conseil de sécurité.
Nous espérons que cette approche ouvrira la voie à la relance du processus de négociation et à une résolution définitive de ce long différend. Nous sommes pleinement disposés à soutenir les efforts allant dans ce sens.
Quelles perspectives ouvre la nouvelle « feuille de route » adoptée récemment pour le développement de la coopération économique et culturelle entre Rabat et Moscou ?
La huitième réunion de la Commission intergouvernementale, tenue récemment à Moscou, a abouti à l’adoption d’une feuille de route pour renforcer nos relations dans tous les domaines, dont l’économie et la culture.
La Russie souhaite élargir la présence de ses entreprises et de ses investissements sur le marché marocain, un marché en plein essor et considéré comme une porte stratégique vers l’Afrique.
De leur côté, les entrepreneurs marocains expriment un intérêt croissant pour la coopération avec la Russie.
La coopération culturelle et éducative constitue également un pilier important de notre partenariat : le nombre d’étudiants marocains poursuivant leurs études en Russie augmente constamment, y compris dans le cadre des bourses gouvernementales russes.
Les programmes d’enseignement de la langue russe au Maroc se développent, et les universités russes s’intéressent davantage à l’enseignement de l’arabe.
L’intérêt des touristes russes pour le Maroc ne cesse également de croître. Pour répondre à cette demande, Royal Air Maroc prévoit prochainement le lancement d’une nouvelle liaison entre Casablanca et Saint-Pétersbourg, en plus de la ligne Casablanca-Moscou déjà opérationnelle.
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