Après une période marquée par une succession record de faillites, le tissu entrepreneurial marocain pourrait entrevoir les premiers signes d’un apaisement. D’après les projections d’Allianz Trade, 2026 marquerait le début d’un reflux, avant une décrue plus nette en 2027.
Depuis la pandémie, les très petites, petites et moyennes entreprises marocaines évoluent dans un environnement d’une rare complexité. L’arrêt des dispositifs de soutien public, la poussée de l’inflation, la hausse des coûts de production et la pression fiscale ont mis à rude épreuve des milliers d’acteurs économiques. Ces contraintes, amplifiées par une conjoncture mondiale instable, ont alimenté une vague de défaillances sans précédent au sein du tissu productif national.
Les statistiques publiées par Allianz Trade illustrent cette tension : 14.245 entreprises ont cessé leur activité en 2023 (+15 % sur un an), puis 15.658 en 2024 (+10 %). L’année 2025 devrait établir un nouveau record avec près de 16.800 défaillances, soit un niveau plus que doublé par rapport à la période précédant la crise sanitaire. Cette dynamique illustre la fragilité persistante des TPME, maillon essentiel de l’économie marocaine, confrontées à une succession de chocs sans précédent.
Mais un tournant se dessine. À partir de 2026, le nombre de faillites devrait légèrement reculer (-1 %), avant un repli plus prononcé en 2027 (-6 %), ramenant les défaillances autour de 15.600 cas. Ces niveaux restent encore supérieurs à la moyenne pré-pandémique, mais ils traduisent enfin une stabilisation après quatre années de records. Un signe encourageant pour les acteurs économiques, même si la normalisation prendra du temps.
Cette trajectoire nationale s’inscrit dans un contexte mondial lui-même en transition. Allianz Trade prévoit une hausse continue des défaillances d’entreprises à l’échelle planétaire en 2025 (+6 %) et en 2026 (+5 %), avant une première inversion en 2027 (-1 %). Les tensions les plus fortes sont observées en Asie et en Europe occidentale, où la reprise peine à s’affirmer.
En Europe, plusieurs pays continueront d’afficher une progression marquée des faillites en 2025, notamment l’Italie (+35 %), la Suisse (+26 %) et l’Allemagne (+11 %). À l’inverse, certains marchés amorcent déjà une stabilisation : le Royaume-Uni et l’Espagne se rapprochent d’un plateau, tandis que les Pays-Bas, le Portugal ou la Suède enregistrent des reculs. Pour 2026, la zone euro afficherait une baisse moyenne de 1 à 2 %, avant un reflux plus net en 2027 (-3 %).
Pour Allianz Trade, trois vulnérabilités majeures continueront toutefois de freiner la consolidation du redressement mondial. La première tient à une croissance trop faible pour enrayer durablement les défaillances, en particulier aux États-Unis et en Europe. La deuxième concerne des conditions de financement toujours tendues : taux d’intérêt élevés, accès restreint au crédit et besoins de trésorerie importants pour les PME. Enfin, certains secteurs stratégiques, comme la construction et l’automobile, restent fragilisés par la hausse du coût du capital, les transformations technologiques et une concurrence accrue.
Le rapport souligne également un risque plus diffus mais significatif : la multiplication des jeunes pousses technologiques et la frénésie autour de l’intelligence artificielle. Si cette dynamique devait ralentir brutalement, elle pourrait accentuer les vulnérabilités financières, notamment en Europe et aux États-Unis, où l’investissement dans l’innovation atteint des niveaux record.
Pour le Maroc, la perspective d’un léger reflux des défaillances n’efface pas la réalité d’un tissu entrepreneurial encore sous pression. Les efforts de diversification, d’accès au financement et de montée en compétences restent déterminants pour consolider la résilience des TPME. Après des années de turbulences, la reprise s’annonce lente, mais l’espoir d’un retour à la stabilité réapparaît enfin.
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