Antonio Guterres, Secrétaire général des Nations unies, a lancé un avertissement solennel dans son rapport annuel présenté à la 80ᵉ session de l’Assemblée générale. Il y alerte sur l’aggravation de la crise humanitaire dans les camps de Tindouf, où s’entassent des milliers de réfugiés sahraouis. Le haut responsable onusien a souligné que « la réduction des aides internationales a eu un impact direct sur l’alimentation, l’eau, l’éducation et la santé, alors que le déficit de financement pour l’année 2025 est estimé à 103,9 millions de dollars ; ce qui illustre la fragilité de la situation et la dépendance persistante des populations à l’égard de l’aide extérieure, en l’absence d’une solution politique susceptible de mettre fin à leurs souffrances continues ».
Pour Lahcen Aqartit, chercheur en relations internationales, ces mises en garde portent de multiples significations et adressent des messages clairs à la communauté internationale. « À mon avis, ces avertissements sont lourds de sens ; ils constituent d’abord un signal au concert des nations que ce conflit, qui dure depuis plus de cinquante ans, a généré d’immenses catastrophes sociales et humanitaires dans les camps de Tindouf », a-t-il déclaré.
Dans une déclaration à Hespress, il a poursuivi : « Nous savons que le constat ne provient pas uniquement des rapports des agences onusiennes, mais aussi de ceux des organisations internationales en général, notamment le Programme alimentaire mondial et l’Union européenne. Tous font état de la situation désastreuse sur le plan humanitaire dans ces camps de détention forcée à Tindouf. Une réalité qui pèse lourdement sur les épaules de la communauté internationale et qui recèle des menaces sérieuses pour la sécurité régionale, puisque la situation humanitaire dans ces camps demeure une source de profonde inquiétude pour les organisations internationales, y compris l’ONU ».
Le chercheur a également mis en garde contre une dérive supplémentaire : « Cette situation sociale et humanitaire désastreuse favorise le recrutement d’enfants, que ce soit dans les rangs du Polisario ou par les mouvements terroristes qui sévissent dans la région du Sahel et du Sahara. C’est pourquoi ce contexte représente un défi majeur pour la communauté internationale. C’est en même temps un message politique clair, à l’approche de la session annuelle du Conseil de sécurité consacrée au conflit artificiel autour du Sahara marocain ».
Aqartit a souligné que ces avertissements sont directement liés aux enjeux de paix et de sécurité régionales. « De toute évidence, ces mises en garde concernent directement la question de la sécurité et de la stabilité dans la région. C’est un message sans équivoque adressé au Conseil de sécurité, l’exhortant à trouver une solution définitive et urgente à ce différend artificiel sur le Sahara marocain. Le maintien du statu quo dans les camps de Tindouf, devenus une prison à ciel ouvert et qualifiés de camps de la honte, traduit une réalité dramatique, marquée par la détention arbitraire et le confinement forcé des réfugiés », a-t-il insisté.
Et d’ajouter : « Ce message que le Secrétaire général adresse au Conseil de sécurité souligne l’impérieuse nécessité de mettre fin à ce conflit. Ces avertissements mettent également en lumière la baisse des aides fournies par les agences internationales, ce qui signifie que les camps de Tindouf constituent désormais un fardeau écrasant pour la communauté internationale en général, et pour les agences et organisations humanitaires en particulier. Dans son ensemble, le rapport brosse un tableau sombre et inquiétant de la situation à l’intérieur de ces camps ».
De son côté, Abderrahmane El Fatihi, également chercheur en relations internationales, estime que le rapport de Guterres marque un tournant dans le ton employé face à ce dossier. Il relève que « la teneur du rapport du Secrétaire général sur la question du Sahara avertit des dangers liés à la prolongation du conflit. C’est un message adressé aux parties qui refusent de se conformer aux résolutions du Conseil de sécurité : cette attitude n’est plus acceptable, car elle fait peser de graves menaces sur la sécurité et la stabilité de la région ».
Dans une déclaration à Hespress, il a expliqué que « la situation humanitaire dans les camps de Tindouf est devenue insoutenable », ajoutant : « Elle est intolérable à plus d’un titre, en raison notamment de la mauvaise gestion des aides humanitaires et de l’ampleur de la corruption entourant la distribution des denrées alimentaires internationales par des éléments du Polisario, en collusion avec le régime militaire algérien. Par ailleurs, l’Algérie entrave l’application des recommandations du Conseil de sécurité, notamment en ce qui concerne le recensement des personnes séquestrées dans ces camps. Tout cela contribue à la diminution des aides et engendre de lourdes conséquences humanitaires sur la vie des détenus ».
Le chercheur a ajouté que « bien que le rapport emploie un langage apparemment neutre, il met clairement en évidence la responsabilité de l’Algérie et du Polisario dans le mépris des revendications humanitaires et des droits fondamentaux des séquestrés. L’Algérie a bloqué les programmes onusiens de construction de la confiance au profit des familles des détenus. Ainsi, le rapport attire l’attention sur l’aggravation d’une situation humanitaire catastrophique dans les camps de Tindouf, ce qui appelle à une volonté politique renouvelée afin de mettre fin aux souffrances des séquestrés, conformément aux recommandations des instances onusiennes spécialisées dans la question des réfugiés et dans l’assistance humanitaire aux populations des camps de Lahmada ».
El Fatihi a conclu en affirmant que la priorité des Nations unies demeure le suivi attentif de cette situation humanitaire préoccupante et la définition d’une perspective pour la surmonter : « Comme l’ONU fait du suivi de cette situation alarmante dans les camps de Tindouf et de l’élaboration d’une issue à cette impasse une priorité, il ne fait aucun doute que cela s’inscrit dans les efforts onusiens visant à clore définitivement le conflit du Sahara, sur la base d’une solution bénéficiant d’un large soutien international et reposant sur l’initiative d’autonomie », a-t-il indiqué.
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